FILIGRANES

XIVe siècle


La base de données « Filigranes » a été constituée à partir de l'étude systématique des papiers utilisés à Toulouse au XIVe siècle. Tous les fonds des Archives municipales ainsi que les fonds de notaires conservés aux Archives départementales pour cette période ont été utilisés en priorité.

Histoire du filigrane


Du latin filum qui signifie fil, et granum, grain, le terme désigne, dans le cadre de la fabrication du papier, l'empreinte interne de la feuille de papier - lettre, figure ou dessin - que l'on peut voir par transparence.

Le filigrane constitue l'État civil du papier car il permet de connaître la date et le lieu de sa fabrication.
On distingue trois variétés de filigranes : le filigrane clair, le filigrane noir et le filigrane ombré.

Utilisation

L'usage du filigrane apparaît au XIIIe siècle dans les premiers moulins à papier de la région de Fabriano puis en France dans le deuxième quart du XIVe siècle.
Au XVIe siècle, parallèlement à l'expansion des moulins à papier, les filigranes français s'imposent et remplacent progressivement les filigranes italiens.

Le premier filigrane connu. Croix grecque de 1282 faite à Bologne par le papetier Fabriano (Dictionnaire historique des marques de papier de Briquet, tome II)

Au XVIe siècle, parallèlement à l'expansion des moulins à papier, les filigranes français s'imposent et remplacent progressivement les filigranes italiens.

L'utilisation du filigrane se perd complètement après 1830 au moment où les moulins commencent à disparaître, remplacés par des usines équipées de nouvelles machines à papier en continu.

Aussi, ne trouve-t-on pratiquement plus aucune trace de filigrane vers le milieu du XIXe siècle, si ce n'est dans le papier timbré, le papier monnaie et enfin dans l'édition de luxe à partir de la seconde moitié du XIXe siècle jusqu'à nos jours.

Marques

A l'origine, les papetiers adoptent des dessins inspirés de la vie quotidienne : armes de guerre (gantelet, arbalètes…), accessoires de chasse (cornet, héron…), objets usuels (outils, balance, clés, pots…), mais aussi animaux, fleurs, armoiries, emblèmes religieux, mains, etc.

Certains de ces motifs dérivent directement de l'ornementation gothique, omniprésente en cette fin du Moyen Âge, que ce soit dans l'architecture, la sculpture, la peinture ou le livre. Il en résulte des représentations filigranées d'animaux symboliques (licorne, basilic, dragon…), de signes religieux (croix, coquille de pèlerin, clefs de Saint Pierre…), d'évocations mythologiques (soleil, croissant de lune, étoiles…).

Ces marques commerciales font l'objet de nombreuses contrefaçons, aussi les papetiers ajoutent-ils une contremarque : l'initiale de leur patronyme, voire le nom ou les armes de leur ville, de leur région ou de leur protecteur.

Lors de la Révolution, les emblèmes de la royauté tels que les fleurs de lys font place aux symboles républicains : piques, haches, fusils, drapeaux…. De même, dès la proclamation de l'Empire, apparaissent les filigranes à l'effigie de Napoléon et avec la Restauration reparaissent les attributs de la royauté.

Fabrication du filigrane

Les formes métalliques, remplaçant la forme de bambou ou de roseau, sont des cadres rectangulaires en bois fermés d'un côté par quinze à vingt minces tiges parallèles en sapin, appelées pontuseaux, sur lesquelles repose un réseau serré de fils transversaux en laiton, dits vergeures.
A la fin du XIIIe siècle, les papetiers italiens introduisent sur ce treillis un motif dessiné par un fil en laiton cousu sur la trame : le filigrane.
Ces moules sont plongés manuellement dans une cuve emplie de pâte puis retirés. L'eau s'écoule à travers les ouvertures du réseau, mais non les matières solides, qui se rassemblent sur les vergeures en créant un matelas fibreux.

Ce dernier est ensuite déposé sur un feutre, puis introduit avec son support entre les plateaux d'une presse, qui expulse une partie du liquide aqueux et fait naître une feuille solide pour être mise à sécher sur des cordes. Les feuilles produites par cette méthode, dite à la cuve ont la dimension des formes qui leur donnent naissance.
A la fin du XVIIIe siècle, les pontuseaux et vergeures sont remplacés par une fine toile métallique ne laissant aucune trace discernable en transparence. Les papiers fabriqués antérieurement à ce remplacement sont dits vergés, les papiers fabriqués postérieurement sont appelés vélins.

 

Accès à la base de données filigranes

Briquet Charles-Moïse (1839-1918)


Originaire de Genève, issu d'une famille de papetiers depuis 1687, Charles-Moïse BRIQUET acquiert dans sa jeunesse, outre les connaissances techniques et commerciales indispensables à un papetier, une instruction générale étendue, notamment dans le domaine scientifique.

En 1860, il débute, pour vingt ans, une carrière de négociant en s'associant avec son père, puis épouse Caroline-Marguerite Long qui devient sa collaboratrice.

Durant ces années, il participe activement à la vie sociale de sa ville en s'impliquant dans de nombreuses œuvres et consacre ses loisirs à l'alpinisme jusqu'à ce qu'il ressente les premières atteintes d'un asthme chronique.

Depuis, il commence à s'occuper d'un sujet qui va absorber tout son temps jusque dans les dernières années de sa vie : l'étude de l'origine du papier en Suisse, sa composition et sa fabrication. Ses vingt années de recherches se traduisent , en 1907, par la publication d'un ouvrage en quatre volumes sur les filigranes qui lui vaut le grade de Docteur es Lettres honoris causa de l'Université de Genève.

Malgré la cécité qui atteint Charles-Moïse BRIQUET dans les dix dernières années de sa vie, il continue cependant à produire ses mémoires sous la dictée. Il assiste aveugle à la mort de sa femme en 1912 et décède, à Genève, le 24 janvier 1918.

Bibliographie


Biasi (De) P.M, Le papier, une aventure au quotidien, Gallimard, Découvertes Gallimard Histoire, n°369, Evreux, 1999.

Blasselle B., Histoire du livre, Gallimard, Découvertes Gallimard Histoire, n°321, Paris, 1997, 2 tomes.

Briquet C.-M., Les Filigranes. Dictionnaire historique des marques du papier dès leur apparition vers 1282 jusqu'en 1600, G CORG-OLMS, 2° édition, 1991, 4 volumes.

Doisy M.-A. et Fulacher P., Papiers et Moulins, Editions Technorama, Arts et Métiers du Livre, Paris, 1997.

Gaudriault R., Filigranes et autres caractéristiques des papiers fabriqués en France aux XVII° et XVIII° siècles, Paris, CNRS Editions - Editions J. Telford, 1995.

La Chapelle (De) A. et Le Prat A., Les relevés de filigranes, Paris, 1996.

Petit-Conil M. , Le papier, PUF, "Que sais-je",6° édition,Paris, 1997.

Zerdoun Bat-Yehounda M., Les papiers filigranés médiévaux : Essai de méthodologie descriptive, Bibliologia 7 et 8, Brepols, Turnhout (Belgique), 1989.