L'image du moi(s)
Chaque mois, petit billet d'humeur et d'humour à partir d'images conservées aux Archives. Forcément décalé !
Bien commencer l'année n'est jamais facile, c'est vrai, mais pour l'année qui vient de s'écouler, ça a été une vraie gueule de bois. Si on s'était bourré d'amphétamines et d'alcool pendant trois jours sans dormir on n'aurait pas été aussi hébétés qu'en face de nos écrans le mercredi 7 janvier 2015 vers midi. Devant ces scènes de guerre, l'effroi, l'incrédulité, la tristesse, la colère. Et puis, quelques jours plus tard l'espoir, dans les rues, tous unis, on fait bloc.
Dès le 7 janvier des rassemblements spontanés ont lieu dans les villes de France et du monde en hommage aux victimes des attentats. Des messages sont déposés par des particuliers dans des lieux emblématiques. Le slogan « Je suis Charlie » est crée par le graphiste Joachim Roncin et repris par des millions de personnes sur les réseaux sociaux et dans la rue. A Toulouse, les gens se regroupent place du Capitole et déposent leur témoignages sur la façade de l'hôtel de ville.
Le 8 janvier, un jour de deuil national est décrété. A midi, une minute de silence est observée provoquant des incidents dans plusieurs établissements scolaires. Certains élèves contestent le slogan « Je suis Charlie ». Un hommage officiel est rendu à Toulouse au siège de la métropole (Marengo) puis ensuite place du Capitole. Le soir le message « Toulouse est Charlie » est projeté sur la façade de l'hôtel de ville.
Le 10 janvier, des marches républicaines sont organisées dans toute la France (Nantes, Marseille, Strasbourg, Lille, Nice, Orléans, etc.) réunissant un nombre de personne inédit jusqu'alors. Parmi elles, les représentants des institutions, des différents cultes, partis, syndicats dans un esprit d'union nationale. A Toulouse, 150.000 personnes marchent sur les boulevards, applaudissant les forces de l'ordre et entonnant à intervalle régulier la Marseillaise.
Chaque jour, et ce jusqu'au 16 janvier, les Toulousains se recueillent sur la place du Capitole et plus particulièrement devant l'hôtel de ville où sont déposés des témoignages en grand nombre.
Les 420 messages collectés par les Archives nous renseignent sur l'état d'esprit d'une population suite aux évènements tragiques des 7, 8 et 9 janvier 2015. Il peut s'agir d'hommages aux victimes, mais aussi de textes plus politiques. La tonalité générale est à l'union dans l'émotion, la condamnation des actes terroristes et la défense des libertés et de la démocratie.
Le fonds 76Fi est consultable en ligne ainsi que les reportages photographiques réalisés à cette époque (recherche Index Organismes Charlie Hebdo).
La question est sur les lèvres des rares touristes qui errent dans Toulouse entre le 1er et le 15 août. On pourrait croire que la chaleur a chassé les passants hors des rues vers les magasins. Il n'en est rien car la majeure partie des boutiques sont fermées. Mais où peuvent-ils être alors ? A la terrasse d'un café ? Au restaurant ? Impossible, car la plupart des établissements ont tiré la grille pour cause de congés annuels.
Où sont-ils donc ? Je vais vous le dire : ils sont à Palavas-les-Flots, à Hossegor, sur la Costa-Brava, et j'en passe ; il paraît même qu'il y en a qui sont en Ariège, mais ça je n'y crois pas trop. Bref, ils sont partout ailleurs qu'à Toulouse car ils savent qu'en août la Ville Rose sombre dans une profonde léthargie.
Ainsi, à bord du petit train qui pour l'occasion prend des airs de train fantôme, le pauvre touriste traverse une ville déserte où apparaît quelquefois, aux abords d'un feu rouge, la silhouette d'un jongleur abandonné par ses congénères qui ont pris à temps la route des festivals.
Si, miraculeusement au cours de ses pérégrinations, le visiteur parvient à trouver un café ouvert, il sera le seul client de la journée. En même temps, c'est aussi ça les vacances : le calme, le silence, le retour sur soi. Pour celui qui recherche des activités, c'est plus compliqué. Bon, il peut toujours s'asseoir sur un banc et jeter des gravillons sur les pigeons.
Le mois de septembre n'étant pas des plus folichons, pourquoi n'accepterions nous pas l'invitation du professeur Pierre à passer un moment ensemble à nous tenir les côtes ? Je ne sais pas pour vous, mais en ce qui me concerne, lorsque l'on me convie à une « grande soirée de rigolade » je suis toujours un peu circonspect. D'autant plus circonspect quand la personne qui lance l'invitation est un professeur de patin à roulettes ressemblant comme deux gouttes d'eau à Adolf Hitler ; cela semble aussi incongru que Staline en deltaplane ou Pinochet à ski nautique.
Certes, il a l'air bien inoffensif derrière son vélo à carriole, brandissant une paire de patins. Mais ne nous y trompons pas ! le patin est une arme redoutable, pour qui sait en user, et pire encore pour qui ne sait pas. Par exemple, je ne sais plus combien de paires de jeans j'ai pu déchirer en essayant de me tenir en équilibre sur ces petites plates-formes roulantes. Mes genoux en portent encore les stigmates. C'est sûr, on se fait mal... mais on rigole bien, comme dirait Pierre.
On peine à le croire aujourd'hui, mais il y a soixante six ans fut inaugurée entre Paris et Toulouse l'une des lignes de chemin de fer les plus rapides d'Europe. Ce train nommé le « Capitole », reliait la gare de Paris-Austerlitz à celle de Matabiau en traversant le Massif Central, atteignant des pointes de deux cents kilomètres heure. Avec le temps et l'émergence du TGV, la ligne perdit de sa superbe.
Elle revint de façon macabre sur le devant de l'actualité à l'occasion d'un attentat perpétré le 29 mars 1982 à hauteur de la commune de La Jonchère-Saint-Maurice, près de Limoges. La bombe, qui fit cinq victimes, était dissimulée à l'intérieur d'une valise déposée dans l'une des voitures du convoi. Cet acte fut revendiqué par le terroriste Carlos.
Dans un registre plus léger, notons qu'à la même époque un chanteur homonyme perpétra un certain nombre d'attentats musicaux nommés « Big bisou » ou « Papayou » pour lequel il ne fut jamais inquiété. Jamais inquiété non plus le poète bruxellois Plastic Bertrand qui sur le thème ferroviaire commit les vers suivants : «Le train de mon enfance roule / Sur les rails de mon indifférence ».
Toutefois rendons à César ce qui est à César : ledit Plastic n'était que le préposé aux play-back, les véritables auteurs-compositeurs-interprètes de la chanson citée, à savoir « Le petit tortillard », se nommaient Sylvain Vanholmen, Lou Deprijck et Yvan Lacomblez. En outre, reconnaissons-leur le mérite d'avoir fait redécouvrir, grâce à ce titre, une angoisse oubliée datant des débuts du chemin de fer : la sidérodromophobie, la peur irraisonnée de prendre le train. Motivée, en ces temps anciens, par l'appréhension de la vitesse, elle semble bien éloignée des préoccupations du voyageur contemporain qui, lorsqu'il monte dans un train, redoute avant tout... les retards.