L'image du moi(s)
Chaque mois, petit billet d'humeur et d'humour à partir d'images conservées aux Archives. Forcément décalé !
« Purée ! Ils font une exposition sur Pierre Baudis et ils m'ont même pas prévenu. Pourtant, la vérité, je l'ai bien connu moi, Pierre Baudis. Tiens, je me souviens même la première fois que je l'ai rencontré. On était dans la rue avec mon frère et le petit Majoral, on allait manger chez ma mère qui habitait encore à Saint-Aubin ; c'était la tradition, le mercredi, elle nous préparait des œufs à la soubressade, à mourir comme c'était bon.
Donc, on est dans la rue et je vois Guy, tu sais, celui qui est de Casa, qui arrive accompagné d'un type à fière allure. Il nous dit : « vous connaissez Pierre Baudis ? » en nous le présentant. Tout de suite il m'a plu cet homme. Franchement, on aurait pu croire qu'il venait de l'autre côté, tellement il était beau. Et après, chaque fois que je l'ai revu, au magasin ou chez Madame Sintès, toujours sympathique, toujours un mot pour la famille. Ma parole, un homme comme ça, sûr qu'il avait la baraka ».
A l'instar de ce témoin typique mais néanmoins imaginaire, ceux qui ont rencontré Pierre Baudis, qui fut maire de Toulouse de 1971 à 1983, en ont gardé mémoire. L'hommage qui lui est rendu dans la salle Henri-Martin du Capitole jusqu'au 15 janvier prochain permettra aux uns de raviver quelques souvenirs, aux autres de découvrir un homme dont la carrière politique, débutée en 1958, s'acheva avec son décès en 1997.
Ne sentez-vous pas la fièvre monter ces derniers temps ? Une fébrilité ambiante. Une sorte d'état grippal généralisé qui n'augure rien de bon. Mi-énervé, mi-hébeté, on regarde, incrédule, les chaînes d'information continue. À poursuivre sur cette pente, notre santé risque de se détériorer irrémédiablement. Il faut réagir.
Je m'adresse à toi le fiévreux, à toi la goutte-au-nez, à toi le tousseur compulsif. Lève-toi de ton lit ou de ton canapé, et sors dans la rue. En pyjama, en robe de chambre, en pantoufles, en pilou-pilou, ce n'est pas grave. L'essentiel est d'être là. Vous tous, les grippés, les enrhumés, les rhinopharingés de la Terre, unissez-vous, mais évitez de vous toucher quand même, car vous êtes contagieux. Et puis méfiez-vous : quand on sort avec la fièvre, on peut faire des trucs bizarres.
Prenez l'exemple des étudiants toulousains en février 1985. Déjà, pour avoir l'idée d'organiser un carnaval, il ne faut pas aller bien. Imagine, tu t'habilles n'importe comment, et en plus tu défiles dans la rue devant les gens, et en faisant un vacarme pas possible pour bien qu'ils te remarquent. Franchement, si tu voulais te faire moquer, tu ne t'y prendrais pas autrement. Pour peu que tu sois un peu fébrile au départ, ça peut vite dégénérer.
Dites, en mars, ce n'est pas parce que les beaux jours pointent leur museau qu'il faut pour autant se croire tiré d'affaire.
Prenons mon cas par exemple : je me retrouve là, face à vous, alors que je n'ai rien demandé. En fait, j'étais bien tranquille étendu au soleil dans un parc, à sourire parmi les fleurettes naissantes, à les compter et à en conter à la femme la plus délicieuse qu'on puisse imaginer.
Puis voilà qu'on vient nous déranger pour m'apprendre que votre billettiste d'humeur habituel est allé dévaler des pentes enneigées. À son âge, ce sont des choses qu'on ne fait pourtant plus, à plus forte raison quand on n'a pas d'enfants pour vous y pousser.
Bref, l'inconscient se retrouve maintenant (après un bref héliportage non programmé) dans une chambre d'hôpital, hanche cassée, jambe fracturée, péroné brisé ou je ne sais quoi d'autre encore de travers.
Comme je suis bon prince, je lui souhaite un prompt rafistolage et rétablissement.
En revanche, me vient cette crainte : qu'un clown se mette en tête de venir dérider une de ses longues journées d'hôpital passée à fixer le plafond, immobile dans sa gangue de plâtre, et là il y a aura encore de la casse, je peux vous l'assurer.
Donc, un conseil, laissez-tomber la neige et allez taper dans une balle avec Odette. D'ailleurs, que je sache, Odette n'a jamais eu à souffrir de la moindre luxation ou entorse, et pourtant elle jouait en bottines à talons. Finalement, seule la plaque qui fixe cet instant est un peu cassée et rayée.
Et si vous voulez savoir comment s'est fini cet échange de tennis-ball, il vous suffit de cliquer ici.
Lors de la journée du 10 août 1792, qui allait annoncer le début de la Terreur, plusieurs centaines de Gardes suisses affectés à la protection du roi furent massacrés en défendant le palais des Tuileries et ensuite inhumés dans le jardin attenant. Au cours du 19e siècle, la presse en mal d'actualité, se fit régulièrement l'écho du fleurissement, aux premiers jours du printemps, d'un marronnier à fleurs rouges sur l'emplacement des tombes. Ainsi naquit l'expression de « marronnier ».
Quelques mois après le découpage en pièces de la soldatesque helvète, la Convention décréta la levée en masse de plus de 300 000 hommes, donnant corps à ce qui allait devenir un marronnier, pour ne pas dire une marotte, de la vie publique française : le service militaire. Depuis, à intervalle régulier, il est question de le supprimer, de le rétablir, de l'allonger, de le raccourcir, de l'élargir, de le resserrer... Bref, lorsque les débats s'affadissent, que les idées s'étiolent, que les discours deviennent par trop bancals, on ressort la béquille de la conscription qui, si j'ose dire, reprend du service.
Notons que les personnes qui s'en emparent ne sont, en règle générale, pas directement concernées. En revanche, si vous vous vouliez gâcher une soirée d'étudiants dans les années 1980, il vous suffisait d'évoquer les « trois jours » pour voir les visages des jeunes hommes se décomposer. Et que dire de ces autres gaillards qui, un siècle plus tôt, devaient se rendre à la mairie de leur commune pour assister au tirage au sort des « heureux » élus ? Plus le chiffre qui sortait était bas, plus la durée du service était longue, de un à trois ans. Espérons que le Toulousain de 20 ans à qui fut attribué le numéro 233 se trouva relativement épargné.
Comme un jeune en juin, on a envie de sécher les cours, de grimper aux arbres, de faire le kéké. On veut se baigner à minuit, dormir à midi, tuer le temps en jeux idiots, crises de fou-rire et plans sur la comète. Mais ce qui est vraiment important c'est de passer et repasser sur son engin à plein gaz dans les rues du quartier en faisant le plus de bruit possible, et si on peut taper une roue arrière c'est encore mieux. Surtout pour emballer les filles.
C'est sûrement ce qu'est en train de se dire Lionel qui a fait monter Gaëtane à l'arrière de sa Yamaha. Et là, vu l'expression du visage de la belle, il a franchi un grand pas. Certes, elle n'a pas encore passé ses bras autour de son blouson de cuir, mais ça ne saurait tarder. Pour peu qu'elle s'imagine tout contre le héros de L'équipée Sauvage, sillonnant l'Amérique sur sa Triumph, l'affaire est dans le sac.
Sauf que le gars devant n'est pas Marlon Brando et, vu de l'extérieur, on dirait plutôt le Tonnerre mécanique des Oustalous. Pour être juste, il faut reconnaître que la passagère tient plus de Véronique Jeannot dans Pause-Café que de Nancy Sinatra dans Les Anges Sauvages. Mais quand on est jeune en juin, ça ne compte pas.
Alors que le soleil brille, que les vacances s'annoncent et que l'on s'apprête à célébrer le 14 juillet, est-il vraiment opportun de se replonger dans les heures sombres de notre histoire ? Loin de moi l'idée de vouloir casser l'ambiance festive et estivale mais force est de constater que le 10 juillet est bien la date anniversaire du vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain par l'Assemblée nationale de la République française.
Il est vrai que la situation en 1940 était exceptionnelle : les Allemands en armes avaient envahi le pays, poussant une large partie de la population vers le sud. Remarquez, c'est toujours un peu le cas aujourd'hui, sauf que les Teutons sont en short-claquettes et que les Français font trempette à Palavas-les-Flots. Mais arrêtons ici cette analogie douteuse et penchons-nous sur nos sénateurs et députés.
Car, à la date du 10 juillet, ce sont bien ces deux catégories de représentants des citoyens qui se sont exceptionnellement réunis au théâtre du Grand Casino de Vichy. En l'absence de plusieurs de leurs confrères, ils ont voté à une écrasante majorité (569 contre 80 voix) l'attribution des pleins pouvoirs constituants au président du Conseil Philippe Pétain. Par la suite, les partis se sont rejeté la responsabilité de cet acte, mais il faut bien reconnaître que ceux qui ont plébiscité le Maréchal étaient de toutes les tendances, il y a en avait même un du Front commun contre le fascisme ; c'est pour dire...
Comme chaque année, le mois de septembre voit la reprise des guéguerres médiatiques autour de petites phrases et autres controverses assez vaines. Le phénomène est ancien, mais son périmètre s'est élargi avec le développement du web et des réseaux sociaux. Il a aussi changé de nom : on ne parle plus de dispute ou de bataille, mais de clash.
Avec le clash on passe sur les préliminaires de la discussion et on arrive directement à l'insulte. Remarquez, comme ça, on gagne du temps. Mais on perd aussi rapidement le fil. Si bien qu'au bout d'un moment on ne sait trop bien pourquoi on s'échange des noms d'oiseaux ou on s'assomme à coup de casque. Ou plutôt si, on sait que le sujet importe peu et qu'il s'agit avant tout d'une guerre de réputation, de street cred comme disent les jeunes.
L'un des maîtres de ce type de joutes était indéniablement le boxeur Mohamed Ali, qui avant et pendant les combats, menait une guerre psychologique contre ses adversaires faite de provocations et d'insultes, qui portait souvent ses fruits sur le ring. Il fut ainsi plusieurs fois champion du monde poids lourds WBA.
Louis Mbarick Phal alias Battling Siki, que l'on voit sur cette photographie réalisée à l'occasion d'un combat à Toulouse, fut lui aussi champion du monde du noble art mais quarante ans plus tôt, en 1922. Originaire du Sénégal, il est le premier africain à gagner ce titre. On ne sait pas s'il était adepte du clash d'avant match, on sait juste qu'il menait une vie assez extravagante. Grand consommateur d'alcool, enclin à la bagarre, fashion victim, on l'aurait vu promener un lion en laisse dans les rue de Paris.
Vient un moment dans l'année où l'on souhaiterait ralentir le cours des choses. Cela se passe généralement au mois d'octobre. Les jours raccourcissent, les températures baissent, les feuilles tombent et l'on voit se profiler à l'horizon le spectre hivernal.
Alors, un peu lassé de l'été et des beaux jours mais craintif des rigueurs de décembre, on se prend à rêver d'un automne éternel qui, sous son manteau de feuilles dorées, nous préserverait des frimas de l'hiver. Nous serions tous un peu poètes, mélancoliques, à méditer sur l'inéluctable passage du temps. Tels des Lamartine en herbe, des apprentis Verlaine ou des jeunes Hugo, nous goûterions au bonheur d'être triste.
Poète, Jacques Krouto ne l'était peut être pas, mais gageons, qu'à l'instant où il fut immortalisé par André Cros, il souhaitait ardemment que le temps s'arrêtât. En ce 10 octobre 1971, à 16h30, il s'était élancé aux commandes de sa moto dans un « saut de la mort » au-dessus de la Garonne près du village du Fauga. Si cet instant de liberté ultime, suspendu dans les airs, avait pu durer éternellement, il lui aurait épargné une mauvaise chute à son retour sur terre, l'empêchant ainsi de réitérer son exploit au volant d'une voiture.
Sur les décombres de l'année écoulée, le mois de décembre sonne l'heure des bilans mais aussi celle des nouvelles perspectives. Finalement, qu'avons-nous retenu des événements qui se sont déroulés depuis janvier dernier : une nouveau président en France, des attentats en Europe et dans le monde, et une ribambelle de personnalités, plus ou moins chères à notre cœur, qui ont définitivement quitté la scène ?
Sans vouloir minimiser la récente disparition de notre Johnny national, il est un décès qui m'a particulièrement touché cette année ; celui de John Hillerman. Peut-être faut-il avoir grandi dans les années 1980 pour le comprendre. Cet acteur, cantonné dans des second rôles au cinéma, devint célèbre en incarnant Jonathan Quale Higgins III, ancien officier de l'armée britannique, dans la série télévisée Magnum. Sorte d'Auguste tout en distinction et dignité, affublé de deux dobermans nommés Zeus et Apollon, il affrontait régulièrement l'histrion éponyme du programme incarné par le moustachu à pilosité contractuelle Tom Selleck.
Il faut surtout avoir connu la déprime des dimanches après-midi pour comprendre comment, dans ce marasme ambiant où les émissions de Jacques Martin ajoutait à l'angoisse de l'école du lendemain, la série crée par Glen A. Larson et Donald P. Belisario agissait comme un baume sur mon âme d'écolier.