La rue de Bayard

Ancien chemin rural devenu une artère urbaine


De la mise en service du canal du Midi (1681) jusqu'aux années 1930, en passant par l'arrivée du chemin de fer et la construction de la gare (1856), la rue et tout le quartier de Bayard se transforment, passant d'un faubourg rural à un quartier industrieux et animé.

Il était une fois la rue de Bayard


 

 

Un faubourg rural


A partir du 17e siècle, la mise en service du canal du Midi (1681) transforme lentement ce faubourg rural.

La rue de Bayard correspond à un ancien chemin rural, antérieur au 16e siècle. Avant le creusement du canal, il se poursuivait par le chemin de Périole. Il fait alors partie du capitoulat de Saint-Sernin hors les murs.
Les matrices du cadastre de 1680 portent la mention de nombreux puits à roues (des norias), mentions que l'on retrouve dans le cadastre napoléonien (1830), confirmant la vocation agricole de ce faubourg de la ville, jusqu'au début du 19e siècle.

 

Plan de la ville de Toulouse dédié et présenté à Monsieur le frère du Roi, 1777. Joseph Marie de Saget, géomètre, dessinateur ; Pierre Gabriel Berthault, graveur, éditeur à Paris. Eau-forte colorée, 67 x 92 cm. Echelle : environ 1/8640. Ville de Toulouse, Archives municipales, II686 (détail).

Le creusement du canal du Midi (1666-1681)

La mise en service du canal du Midi en 1681 entraîne l'implantation d'activités industrielles et artisanales à proximité, de la fin du 17e siècle au milieu du 20e siècle. Un moulin est installé sur l'écluse Bayard dès la mise en eau du canal. D'autre part, des entrepôts (« magasin à tabac ») sont visibles sur les plans du 18e siècle.
Depuis le 18e siècle, cette voie porte le nom de chemin, puis rue de Bayard. Ce nom provient de la famille Bayard, propriétaire d'une grande parcelle allant aujourd'hui de la rue Matabiau à la rue de Bayard et de la rue de l'Orient au canal. François Bayard, écuyer, propriétaire en 1680, appartient certainement à la famille de Michel Bayard, riche marchand, capitoul en 1608, possédant le château de la Cépière. En 1680, cette parcelle se compose de trois maisons, jardin, puits à roue, vignes et terres, le tout composant une métairie apportant des revenus au sieur Bayard.

L'écluse Bayard à Toulouse, première partie du 19e siècle, Léon Soulié. Aquarelle sur papier, 17 x 27. Toulouse, Musée des Augustins, RO 607 (don Bégué).


Le moulin Bayard

La forte dénivellation de l'écluse double permettait l'installation d'un moulin, à l'instar de l'écluse des Minimes. Construit en même temps que l'écluse, il est affermé pour la première fois en 1674 au meunier Pierre Arquier. Le moulin est détruit en 1909, mais la rue du Moulin-Bayard en conserve le souvenir. 

 

Le domaine du Castelet

Les plans du 18e siècle indique l'emplacement d'une propriété appelée « Castelet ». En 1801, il s'agit d'une grande parcelle occupée par plusieurs maisons, dites « le Castelet », de jardins et de terres, occupant une grande parcelle allant de l'actuelle place Belfort au canal, bordée par la rue de Bayard et la rue du Moulin-Bayard. Le jardin ou la crèche du « Castelet », construits à l'emplacement de l'ancienne école du Castelet, à l'angle des rues Belfort et Cafarelli, ont gardé le souvenir de cette propriété.

Un quartier en mutation rapide


du 19e siècle jusque dans les années 1930

Plan de la ville et faubourgs de Toulouse sur lequel sont tracés les Principaux Projets d'alignement et Boulevards, dédié à Mr. le Maire de ladite ville, & Présenté à Son Altse. Royle. Madame la Duchesse d'Angoulême, le 4 septembre 1815. (1815). Ville de Toulouse, Archives municipales, 20Fi13 (détail).La municipalité toulousaine prévoit une urbanisation plus réglée de ce quartier, ouvert sur la ville depuis la destruction des remparts à la fin des années 1820. Le plan général des alignements réalisé par Urban Vitry en 1841 prévoit le percement de nouvelles rues (Belfort, Caffarelli, Denfert-Rochereau, Stalingrad), et d'une place (Belfort), dans ce qui n'était que jardins.

Ces nouvelles rues sont en partie réalisées à partir de 1844, puis le projet prend plus d'ampleur à partir de 1859 et l'ouverture de la gare. Les rues Raymond IV ou Bertrand de Born, non prévues dans le plan des alignements, sont créées dans la seconde moitié du 19e siècle.

 

Plan de la Ville de Toulouse réduit à moitié du plan général des alignements approuvé par ordonnance Rle. du 26 Décembre 1842. Levé et dressé par Jh. Vitry oncle, inspecteur voyer de la commune de Toulouse. 1848. (1848). Ville de Toulouse, Archives municipales, 22Fi12 (détail).L'usine à gaz

En 1840, il est décidé d'établir l'éclairage au gaz à Toulouse. Le 10 août 1841, la concession est accordée à la compagnie continentale de Londres, qui établit une usine à gaz dans le quartier Bayard (rue du Moulin-Bayard) avec un atelier destiné à l'extraction du gaz de la houille. Le charbon, arrivé par mer à Bordeaux, était acheminé par le canal du Midi. L'usine à gaz occupait un vaste terrain, entre les rues Bertrand-de-Born et de Belfort actuelles.

 

 

Vue du n° 37 rue de Bayard, 2017. Ville de Toulouse, Patrice Nin, RTN17.147.75.La construction de la gare (1856) et l'arrivée du chemin de fer (1857) : un dynamisme qui se poursuit jusque dans les années 1930

En 1854, en prévision de la construction de la gare au-delà de l'écluse Bayard, la municipalité décide la création d'une rue monumentale allant de la future gare à l'angle nord-est de la place du Capitole, en coupant dans le tissu urbain existant, en passant par la place Victor-Hugo. Cette rue devait être bordée de façades uniformes, à l'image de ce qui se fera dix ans plus tard pour les rues d'Alsace-Lorraine et de Metz.

Il est finalement jugé moins coûteux de redresser et de réaligner la rue de Bayard. Dans sa séance du 14 juillet 1860, le conseil municipal adopte le principe de l'élargissement de la rue Bayard à 16 mètres et la communication du boulevard et de la gare. Allant de pair avec ces dispositions, le pont Bayard, permettant un accès direct de la gare au centre ville, est construit en 1860.

L'essentiel des constructions ouvrant sur la rue de Bayard date de la seconde moitié du 19e siècle, entraîné par la dynamisation de ce quartier par l'arrivée du chemin de fer. Il amène également la construction d'hôtels de grand standing, dont certains sont toujours en place (hôtels Régina 73 rue de Bayard, d'Orléans au n° 72, Victoria au n° 76).

De grands noms de l'architecture toulousaine de la fin du 19e siècle (Jacques Lacassin, Georges Masquet, Jules Calbairac, Étienne Gogé,...) et de la première moitié du 20e siècle (les frères Thuriès, Joseph et Jean-Louis Gilet) reviennent à de nombreuses reprises dans les demandes de permis de construire.

 

 

Une activité industrieuse

Immeuble Bancal 54 rue de Bayard, élévation antérieure. Phot. Olivier Balax (c) Inventaire général Région Occitanie, 1995. INV14_95310384ZA.

De grandes entreprises y établissent leurs bureaux et ateliers (l'hôtel de la Dépêche, au n° 57, disparu, construit en 1890 par J. Galinier, associant bureaux et imprimerie, ou l'immeuble Bancal (n° 54) en 1936, prouesse technique de la façade associant béton armé et grande surface vitrée à ossature en fer, dans un style art déco, à la fois édifice commercial et logement du propriétaire).

De nombreuses activités artisanales et industrielles sont installées rue de Bayard : fabricants de produits chimiques, de fils électriques, de carton, bourreliers, fondeur sur métaux, fabricants de carreaux et mosaïque, de fourneaux, de papiers peints, de viraux peints, de biscuits, de caoutchouc, un forgeron, ainsi que des ateliers de réparations agricoles ou encore des entrepôts généraux de matériaux de construction. 

Les ateliers se trouvaient en général en fond de cour, desservis par un passage couvert, tandis que l'immeuble en front de rue abritait les locaux commerciaux et des appartements aux étages. 

La fin du 19e siècle est également marquée par l'arrivée de la prostitution, les hôtels de passe présents dans le quartier contribuent à la mauvaise réputation du lieu, s'amplifiant durant le 20e siècle.

Un quartier qui s'assoupit


dans la seconde moitié du 20e siècle

Le transport de marchandises par le canal, en déclin durant toute la seconde moitié du 20e siècle, périclite dans les années 1980. Les infrastructures qui lui était liées n'ont plus lieu d'être : les entrepôts de l'Épargne sont remplacés par un immeuble en 1974 (résidence La comtale en haut de la rue Matabiau), de même que les anciens bureaux et imprimerie de La Dépêche (1980).

L'écluse Bayard est modernisée à la fin des années 1970 : la mise au gabarit Freycinet des écluses du canal du Midi entraîne la démolition de l'écluse double et la construction d'une nouvelle écluse simple. Le bief entre les écluses Matabiau et Bayard est approfondi pour rattraper la dénivellation et la nouvelle écluse est construite grâce à des parois moulées préfabriquées en béton. Les travaux sont réalisés entre 1978 et 1979.

 

Gare des autobus départementaux, élévation sur la rue Stalingrad. Vers 1950. Ville de Toulouse, Archives municipales, 2Fi2204.La gare des autobus départementaux

(gare routière, 20 rue de Stalingrad - 3 rue Lafont, disparue)

On a oublié que la gare routière se trouvait à l'origine dans le quartier Bayard. Installée dans un bâtiment construit dans les années 1930, elle est déplacée en 1995 boulevard Pierre-Sémard. L'édifice est détruit en 1998 pour laisser la place à un immeuble accueillant un centre médico-social et des logements.

 

 

La rue de Bayard rénovée. Teddie Lorin - Ville de Toulouse, direction de l'Action Territoriale.

Un nouveau visage en 2017

Dans le cadre de l'aménagement du centre-ville, la rue de Bayard fait peau neuve. A l'issue d'un an et demi de travaux, elle est inaugurée le 30 septembre 2017.

Les avez-vous vus ?


La rue de Bayard rénovée

A l'occasion de la fin des travaux de réaménagement de la rue de Bayard, vous êtes invités à tester votre sens de l'observation, en essayant de retrouver à quelles adresses de la rue de Bayard les photographies inscrites sur le cube d'exposition ont été prises. Voici les réponses ! 

Les avez-vous vus ? Détails d'architecture des édifices de la rue de Bayard. Cathy Sié - Ville de Toulouse, direction de l'Action territoriale

 

Pour en savoir plus