ARCANES, la lettre

Dans les arcanes de


Chaque mois, l'équipe des Archives s'exerce à traiter un sujet à partir de documents d'archive ou de ressources en ligne. Retrouvez ici une petite compilation des articles de la rubrique "Dans les arcanes", des édito détonnants pour présenter le thème du mois.

DANS LES ARCANES DE


Affiche publicitaire illustrée pour les pastilles aux sels naturels d'Aulus (dépôt général chez Mr E. Gély pharmacien chimiste, 11 rue Lapeyrouse), 1890-1894. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 12Fi2854 (détail).

Sel que j'aime


novembre 2025

Dans une version à peine parodique d’une célèbre émission de rencontre des années 80 animée depuis une attraction foraine tournante, l’un des candidats masculins interrogeait la potentielle élue de son cœur dans les termes suivants : « Est-ce que tu resales le manger avant de le goûter pour voir si c’est plus salé ? ». La question avait de quoi déstabiliser, mais n’était pas totalement dénuée de fondement tant il est vrai que saler un plat est quasiment un réflexe conditionné chez certains ; réflexe, par ailleurs, souvent préjudiciable à la santé. Mais qu’y faire lorsque « le sel de la vie » représente ce qu’il y a de plus vibrant en elle. Vous l’aurez compris, ce numéro 169 d’Arcanes se place sous le signe de l’« or blanc » dans toutes ses acceptions thématiques et phonétiques.  

Et pour commencer, quoi de plus essentiel que les sels d’argent pour révéler les ombres et lumières de la photographie en noir et blanc. Un de ses maîtres incontesté, Sebastião Salgado (1944-2025), vint présenter ses œuvres, magnifiant l’humanité des plus humbles, à la Galerie du Château d’Eau de Toulouse en 1986. 

Deux cents ans avant la naissance du célèbre photographe, une bande aussi modeste que « dessalée » essaya, en vain, de s’évader des prisons du Sénéchal par les voies les moins ragoûtantes. Le même projet fût tenté, quelques années plus tard, depuis les geôles de l’hôtel de ville en déplaçant la pierre à selles des latrines féminines. 

Rien à voir avec les pierres à sel que l’on trouve dans les champs et écuries compensant les carences en sodium de l’alimentation du cheval. Et ce dernier en a bien besoin lorsqu’il faut suer en portant, sur son dos, l’avenir de la France, en la personne du futur François Ier, comme figuré sur une enluminure des Annales récemment prêtée au Musée National de la Renaissance. 

Il faut dire que la Renaissance est à Toulouse ce que le sel est à Guérande, essentiel. Et quoi de plus normal alors que la ville soit émaillée d’hôtels particuliers contemporains de cette époque. Parmi eux l’hôtel de Brucelles, célèbre pour sa galerie, sa tour et son nom rigolo.  

Il est un peu moins drôle d’être frappé par la mort, et encore moins dans une position peu avantageuse. Du moins pour l’intéressé ; pour les archéologues, c’est une autre histoire qui ne manque pas de selles. 

A vélo aussi, il est recommandé d’être pourvu d’une selle. Et pour éviter les pièges du trafic, le cycliste averti peut consulter les ressources vélocipédiques d’Urban-Hist. A bon entendeur, salé ! 

Villa à Hossegor (Landes), 2 octobre 1929. Armand Courtois de Viçose - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 16Fi91/61.

Le signe de Zéro


octobre 2025

Moins que zéro est un roman de Bret Easton Ellis publié en 1985 où l’on suit la jeunesse dorée californienne expérimentant le triptyque « sexe, drogue et rock’n roll » dans ses aspects les plus troubles. De ces adolescents blasés, évoluant dans un état second au bord des piscines de villas luxueuses, émane une sensation de vide intense, corollaire de l’ennui. L’ennui, cet état d’aphasie, qui nous paraît aujourd’hui bien étrange tant il a déserté nos vies bombardées vingt-quatre heures sur vingt-quatre d’informations jusqu’au bout de nos doigts. Et malgré cela, une sensation de vacuité se fait jour. Car, en vérité, ces contenus numériques composés de 0 et 1 sont pleins de vide. C’est ce vertige qui en pousse certains à fuir le monde connecté, passant de community manager à berger en zone blanche. Mais ce ne sont pas quelques moutons et patous qui vous empêcheront de consulter le numéro 168 d’Arcanes, placé sous le signe du zéro, et dont le sommaire prendra en conséquence la forme d’un compte à rebours. 

Six suivi de zéro : soit les 60 ans de carrière de Jean Dieuzaide durant laquelle il produisit une œuvre considérable qui fut classée, organisée et numérotée selon les bons soins de Jacqueline, sa femme. 

Cinq degrés est une température correcte pour l’intérieur d’un réfrigérateur. On ne sait quelle atmosphère régnait dans les trois glacières toulousaines d’Ancien Régime mais elle permettait de conserver de la glace une grande partie de l’année. 

Quatre comme les quatre C de la devise des archivistes : collecter, classer, conserver, communiquer. Après s’être appliquée durant des décennies aux archives papier, elle concerne tout autant à présent les documents natifs numériques.  

Trois fois de suite un bâtiment emblématique du quartier de la Daurade fut réhabilité : d’abord monastère transformé en manufacture de coton, et ensuite de tabac, il finit en école des Beaux-Arts avec l’aspect qu’on lui connaît aujourd’hui. On parlerait aujourd’hui d’appropriation architecturale, ce qui est toujours préférable à la table rase. 

Deux années, huit capitouls, une école de médecine. Autant d’éléments qui sont à l’origine d’une sculpture disparue (et heureusement photographiée) portant la marque de l’arrivée du zéro à Toulouse. 

Un accès momentanément impossible à notre base en ligne, l’occasion de venir nous rencontrer IRL, d’être conseillé dans vos recherches et accessoirement d’utiliser notre base intranet à disposition sur les postes informatiques de notre salle de lecture. 

Zéro. 

Les frères Durand du Toulouse-Vélo-Club, vers 1940. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi5859.

Double trouble


septembre 2025

Ce week-end, nous espérons que vous serez nombreux à venir troubler la quiétude des Archives pour les Journées Européennes du Patrimoine. Vous aurez droit à un double programme, samedi et dimanche, à base de visites, d’ateliers et d’exposition. Mais que cela ne vous empêche pas de parcourir le délicieusement trouble 167e numéro d’Arcanes

C’est aux confins du septentrion, que commence votre voyage, vers la mythique Thulé. Dans ce paysage, théâtre des sagas nordiques, un groupe de savants, parmi lesquels Maurice Gourdon, se dirige vers le Spitzberg. L’aventure ne se passe pas comme prévu. Il faut croire qu’un Doppelgänger maléfique était sur leurs traces.   

On ne sait si ces explorateurs de l’extrême avaient consommé beaucoup d’aquavit, mais on espère qu’il était de meilleure qualité que les vins frelatés dont il est question dans les procédures judiciaires des 17e et 18e siècles. Certes, l’abus d’alcool fait parfois voir double, mais quand on y ajoute de la chaux, il fait surtout voir rouge. 

Au contraire, l’archiviste doit garder la tête froide en toute circonstance, notamment lors du traitement d’un fonds. Il se doit de prendre une certaine distance pour le contextualiser, et pour l’aider, il y a le RIC (Records in Context). D’autre part, je pense que nous devrions lancer un référendum sur le thème des acronymes “confusionnants”. 

De la confusion, il pourrait y en avoir autour des frères Bénézet. Tous les deux sont actifs à Toulouse dans les années 1860. L’un, Bernard, est un peintre célèbre dont les œuvres ornent de nombreuses églises toulousaines : Saint-Nicolas, Notre-Dame la Daurade, Saint-Etienne, Saint-Sernin et Notre-Dame du Taur. L’autre, Baptiste, est un photographe moins connu dont le studio était installé 5, rue Croix-Baragnon. 

On ne sait si les deux frangins s’entendaient bien, en revanche il est des frères ennemis qui s’affrontèrent violemment à Toulouse quelques siècles plus tôt. Huguenots et catholiques eurent en effet maille à partir au cours de l’année 1562, une porte de la ville en a longtemps gardé les stigmates. 

Mais vous pouvez aussi débusquer d’autres traces de faits divers plus ou moins brutaux dans les zones éloignées du centre urbain. Dans cette banlieue alors rurale, vous vous ferez l’effet d’avoir le don de double-vue, grâce à la couche « champs troubles » d’Urban-Hist. Un pied dans le passé et un autre sur votre trottinette. Attention ! Un accident est si vite arrivé... 

La fanfare des Beaux-Arts de Paris en concert à l’occasion de l’élection de la « Belle Gaillarde » à Noé (Haute-Garonne) le 9 juillet 1961. André Cros – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi2349.

Le ratichon baigneur


juillet - août 2025

Je me souviens d’avoir aperçu ce titre intrigant jouxtant un autre ouvrage de Boris Vian qu’il fallait acheter pour le cours de français. S’il paraissait un peu obscur, l’intitulé railleur m’évoquait une sorte de grand échalas en costume de bain rayé. Mais un ratichon n’était pas, comme je l’avais cru, un être aussi rachitique que maigrichon, mais un prêtre familièrement assimilé à un surmulot d’église. Ainsi, au lieu d’un Stan Laurel dégingandé dans un burlesque film de plage, il évoquait plutôt un Paul Préboist concupiscent dans Mon curé chez les nudistes. Voilà qui fleure bon les vacances pour cet opus estival d’Arcanes n° 166 placé sous le signe thématique et phonétique du rat qui, en astrologie chinoise est rattaché au signe de l’eau. 

Boris Vian n’était pas un rongeur nyctalope, bien qu’habitué nocturne des caves de Saint-Germain, mais une sorte d’éternel adolescent touche à tout. On aimerait aussi redevenir parfois juvénile, vierge de tous préjugés, pour aborder une image comme si elle était la première.  

Vain rêve, tel celui de Colin voulant guérir sa dulcinée d’un cœur nénupharisé dans L’écume des jours. L’eau de farfara, dont la composition est détaillée dans les comptes du Trésorier de 1652 et qui guérit à peu près tout, était peut-être l’antidote de ce mal mystérieux. 

Remède miracle que l’on aurait pu acheter sur un stand de foire ou de fête foraine, vanté par un « Docteur Miracle », à côté d’un cire-godasse et d’un repasse-limace. Les archives de ces manifestations, versées par la direction des Marchés et Occupation du domaine public, sont actuellement en cours de traitement.  

Vous n’y trouverez probablement pas l’attraction « Branko, l’homme fox-terrier qui tue les rats à main nue » qui semble sortir des rêveries du poète à la trompette qui se produisit à Toulouse en mars 1949. Il aurait pu faire retentir son instrument entre les murs de la discothèque « Le Ramier », ouverte un an plus tôt sur cette île qui fût successivement et parallèlement un site industriel, un jardin public arboré et un parc des sports et des expositions.     

Dans une autre zone de loisir située sur les hauteurs à proximité du cours de la Garonne, les rongeurs font une nouvelle apparition, cette fois toponymique avant de devenir patronymique et nous faire redécouvrir une ruelle disparue du quartier de la Daurade à travers les cadastres anciens. Mais comme disait Boris : « Un chien vaut mieux que deux kilos de rats » et je commence en avoir un peu ras-le-bol de nos amis surmulots. 

Je vous invite donc, par ces jours d’intense chaleur, à naviguer sur le gazon de nos espaces verts via Urban-Hist et à vous laisser guider dans la ville vers ses jardins secrets. Et je laisserai le dernier mot à l’écrivain : « Aussi longtemps qu'il existe un endroit où il y a de l'air, du soleil et de l'herbe, on doit avoir regret de ne point y être. » (Boris Vian, L’Herbe rouge). 

Le Maréchal de Mac-Mahon, président de la République, visitant les inondés de Toulouse. Dessin d’Henri Meyer, pris d’après nature dans la rue de Bayonne et sur la place du Chairedon. Le Sifflet, Paris, 11 juillet 1875. Archives de Toulouse, 3D127/1.

“Si j’aurais Crue, j’aurais pas venu”


juin 2025

Telle sentence, ou cri du cœur, aurait pu être prononcée par Patrice de Mac Mahon, premier personnage de l’État, alors qu’il traversait les décombres du quartier Saint-Cyprien de Toulouse détruit par l’inondation des 23 et 24 juin 1875. Au lieu de cela, la légende veut qu’il s’écriât “Que d’eau, que d’eau !” Sans être un spécialiste du genre, il me semble avoir entendu meilleur aphorisme. Toutefois, le plus improbable dans cette histoire demeure qu’il fut prononcé par un Président de la République française qui avait un prénom de coiffeur et un patronyme irlandais. Vous l’aurez compris, l’opus 165 d’Arcanes célèbre à sa façon le 150e anniversaire de la crue de 1875 sous le signe de l’adage et de la citation. 

“J’y suis, j’y reste” du même maréchal-président aurait pu être le leitmotiv des photographes toulousains qui, malgré des conditions difficiles, immortalisèrent les désastres de l’inondation. Un atelier (En)quête d’images leur a été consacré au cours du mois de juin. 

“Il a coulé mon porte-avion !" ne fut jamais prononcé lors de ce qui fût pourtant une véritable bataille navale qui se déroula près de l’église Saint-Nicolas en 1781 alors que la Garonne était une nouvelle fois sortie de son lit. Il sera d’ailleurs question de ces débordements dans l’atelier “Au fil des chroniques des capitouls” du mois de juin. 

“Quand il n’y en a plus, il y en a encore” est de circonstance, car nous avons aussi conçu une exposition sur la même thématique mais en choisissant le point de vue du témoignage de la catastrophe. Les panneaux sont visibles sur le pont Saint-Pierre et des documents originaux sont présentés dans notre salle de lecture. 

Il ne faut jamais dire “fontaine, je ne boirai pas de ton eau”, d’autant moins lorsque l’on est habitant du quartier Saint-Cyprien, et que les points d’alimentation en eau sont rares. Il a fallu une calamité et un philanthrope pour qu’un monument fontaine apaise enfin leur soif.  

En écrivant Les Lettres de mon moulin, Alphonse Daudet n’avait certes pas pensé au moulin du Château Narbonnais qui pourtant arborait sur sa façade moultes inscriptions et repères relatifs aux différentes crues qu’il eut à subir. L’une d’entre elles est aujourd’hui conservée dans un musée de la ville. 

Et pour finir, comme “un tiens vaut mieux que deux tu l’auras”, vous pouvez déjà consulter sur notre base en ligne un index permettant d’accéder à toutes nos ressources sur l’inondation, mais vous pouvez aussi rêver à une cartographie numérique de la crue, qui verra le jour dans les mois à venir.

Hommes en costumes de gladiateurs lors des fêtes Gallo-Romaines de Vic-Fezensac (Gers), 6 et 7 juin 1937. Germaine Chaumel – Mairie de Toulouse, Archives municipales, fonds Martinez-Chaumel, 97Finc. 635/1/1.

Antique et toc


mai 2025

- Et nous reprenons le direct depuis les arènes de Tolosa où les gladiateurs s’apprêtent à saluer la foule pour la 164e édition des jeux du cirque d’Arcanes. Le silence se fait dans l’enceinte alors que retentissent les voix des héros du jour :  

« Ave Arcanus, ceux qui vont écrire te saluent ! »  

- Quelle ambiance ! Quelle atmosphère ! On ressent toute la ferveur des abonnés. 

- Tout à fait Therrix, le programme a de quoi allécher les plus exigeants des afficionados 

- En effet, le sol va trembler grâce aux terribles engins du Capitaine Ferran, immortalisé par Jean Dieuzaide lors d’une campagne de fouilles. 

- Viendront ensuite des dragons à deux têtes et autres créatures fantastiques sorties de l’imagination de scribes facétieux, qui végètent dans les marges de nombreux manuscrits.  

- Dites-moi Jean-Mixus, vous n’auriez pas forcé sur la cervoise ce midi ?  

- Pas du tout. Que je sois placé sous le sceau de l’infamie si je mens ! Et je vous signale au passage que la pratique sigillaire remonte à la plus haute antiquité. 

- Vraiment ? C’est passionnant. Néanmoins accrochez-vous à la balustrade, dont l’étymologie remonte elle aussi à la plus haute antiquité, et dont plusieurs exemples remarquables sont visibles dans des bâtiments toulousains, car le spectacle va continuer.  

- Serrez tout de même votre bourse cher Therrix, car il semble qu’un pickpocket ayant sévi dans un monastère de la Gaule narbonnaise circule actuellement dans les gradins en quête d’antiques monnaies d’argent.  

- Merci Jean-Mixus. On me dit à l’instant que plusieurs citoyens n’ont pas trouvé les arènes. Il y a pourtant un plan d’accès dans Urban-Hist où figurent tous les bâtiments de notre cité palladienne. Pour ceux qui viennent de loin en empruntant la via Domitia, prenez à droite au niveau de Narbonne, la via Aquitania, jusqu’à la sortie XV, et ensuite Omnibus viis Tolosam pervenitur [tous les chemins mènent à Toulouse], si j’ose dire. 

Enfant déguisé en Indien lors de la matinée Travesty, Palais des Sports, 5 mars 1959. Emile Godefroy - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 19Fi5417.

Or de "sauvage"


avril 2025

Lors de leur arrivée en Amérique, les conquistadors furent fascinés par les parures dorées qu’arboraient les dignitaires natifs. Il faut dire que leur voyage était principalement motivé par la découverte de nouvelles richesses, au premier rang desquelles figurait l’or. Ainsi, de véritables hordes sauvages déferlèrent sur ces territoires « inconnus » en quête d’un hypothétique Eldorado provoquant directement ou indirectement la destruction des populations autochtones, tant dans le sud que le nord.  

Mais si les Amérindiens ont été largement décimés, ils ont été - comme c’est souvent le cas - également mythifiés par la littérature et le cinéma. A tel point que l’Indien a longtemps été un incontournable des panoplies pour bambins. Je vous invite donc à enfiler vos mocassins en peau de daim et votre coiffe en plumes d’aigles pour suivre la piste n°163 d’Arcanes et y découvrir moult trésors.  

  

Tout d’abord des portraits carte-de-visite, typiques du 19e siècle, réalisés par des photographes toulousains. Ces « attrapeurs d’ombres » font apparaître quelque chose comme l’âme de leurs sujets.    

  

Ensuite des hommes-médecine d’Ancien Régime dans leur quête éperdue du métal jaune : alchimie, magie, nécromancie. Ils se révèlent essentiellement des charlatans qui devront rendre des comptes à la justice. Rien à voir avec Sitting Bull. 

  

En matière de peinture sur peau, les congénères des Sioux, Kiowas et autres Iroquois ont des leçons à nous donner. Mais concernant les dorures sur cuir ou parchemin, les Archives pourraient leur en remontrer. 

  

En revanche, nul besoin de remonter l’étonnante pendule qui orne la façade d’un bâtiment de la rue Rivals. Les occidentaux ont un temps linéaire et des horloges circulaires, les natifs Américains ont un temps cyclique, et pour cadran la terre sur laquelle ils marchent. 

  

Sur laquelle ils marchent, et dont ils sont issus, si l’on en croit les cosmogonies de la Terre-Mère. Il en est de même d’une certaine monnaie d’or découverte lors des travaux de percement du métro et qui disparut quelques mois plus tard. 

  

Enfin, si vous souhaitez explorer de nouveaux territoires toulousains et partir à la chasse aux trésors patrimoniaux, nul besoin d’être un fin pisteur. Tout est à disposition sur Urban-Hist. J’ai dit ! 

La sculptrice Paqui Chaumel jeune, photographiée par sa mère Germaine, années 1940. Germaine Chaumel - Mairie de Toulouse, Archives municipales, Fonds Martinez-Chaumel, 97Fi, nc.

Archi-femmes


mars 2025

Il y a bientôt trente ans, j’entrais en salle de cours du Département Archives et Médiathèque de l’Université de Toulouse Le Mirail et constatais avec surprise que l’assemblée était à 99 % composée de femmes. M’apparaissait alors les membres d’un ordre archivistique, presque exclusivement féminin, au vocabulaire ésotérique émaillé de « versement », « récolement » et autre « diplomatique ». Je compris que la vocation de cette communauté était la préservation du Patrimoine qui portait bien son nom, tant il émanait principalement d’hommes. Ce statut de gardiennes du temple patriarcal ne pouvait que révolter les intéressées qui se mobilisèrent. Ainsi, de nombreux fonds d’archives féminines ont depuis intégré nos institutions ; une grande collecte sur cette thématique a d’ailleurs été organisée en 2018. Mais comme un combat n’est jamais gagné le n°162 d’Arcanes, se devait, en ce mois de mars, de rendre hommage à ces femmes.

« Être une femme libérée, tu sais, c’est pas si facile » aurait pu dire la photographe Germaine Chaumel (dont nous conservons les clichés depuis 2012), elle qui a toujours suivi ses passions. Divorcée à l’âge de 28 ans, elle se lance dans une carrière de chanteuse lyrique puis bifurque vers la photographie au mitan des années 1930. Etoile montante du photojournalisme local, participant à la fondation du Cercle photographique des XII, elle a laissé une marque indélébile sur la scène toulousaine.

Pour continuer sur la lancée des tubes des années 1980, on pourrait résumer le parcours de la nommée Varenne par « Je suis libre, je suis Catin ». C’est en effet le surnom que se donna Catherine-Elisabeth, femme de tête, qui vécut à la fin du 18e siècle et qui ne s’en laissait conter par personne. Les démêlés qu’elle eut avec la loi et qui figurent dans les procédures judiciaires des capitouls nous ont permis de la connaître.

Comme elle, nombreuses sont les féministes qui se sont mises hors la loi, et longtemps leurs archives sont restées hors les murs. A présent, nous conservons dans nos fonds pas moins de six ensembles provenant d’associations (MLF Toulouse, collectif Midi-Pyrénées pour les droits des femmes, Badgam Espace Lesbien) ou de personnalités (Monique-Lise Cohen, Irène Corradin, Marie-France Brive) illustrant ce mouvement politique et sociétal.

Archi-femmes ce pourrait-être aussi le nom de ces femmes architectes qui, au cours du 20e siècle, ont conçu nombre de bâtiments de notre ville : la Cité Bagatelle, l’Hôtel du département, le Théâtre Garonne, etc. Longtemps invisibilisées ou dans l’ombre d’un mari exerçant la même profession, les Marguerite Moinault, Marie-Louise Cordier ou Denise Scott-Brown sortent enfin de l’ombre.

De l’ombre à la lumière, c’était également le chemin promis aux prostituées qui intégraient, sous l’Ancien Régime, le couvent des Repenties situé rue des Couteliers. Hélas, il s’agissait simplement d’un transfert d’une prison vers une autre.

En revanche, c’est vers de nouveaux horizons, et surtout de nouvelles ressources en ligne, que nous vous invitons. Elles concernent toutes les femmes, productrices, donatrices, sujettes et actrices, de l’Ancien Régime à nos jours, et sont disponibles sur notre site. 

Voilier remorquant une petite embarcation, port de Royan (Charente-Maritime), vers 1900, Antonin Ruffié - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 42Fi220.

C'était mieux à vent


février 2025

Lorsque les navires ont progressivement perdu leurs voiles au cours des 19e et 20e siècles, c’est un peu comme s’ils avaient perdu leurs lettres de noblesse. Car sur les gréments s’était développé tout un vocabulaire mystérieux, sorte d’espéranto des mers composé d’anglais, de français, mâtiné d’allemand, d’italien, d’espagnol, de portugais et de néerlandais, qui fait encore le sel des romans d'aventures maritimes. Bref, la marine, comme les moulins, c’était mieux à vent. Ironie du sort, l'écologie aidant, Eole fait un comeback à bord des super-tankers ou des dispositifs tentent de capter sa puissance motrice. Alors enfilez vos vareuses et vos bérets à pompons, nous appareillions à bord du numéro 161 d'Arcanes où vous ferez la connaissance de notre équipage haut en couleurs.  
A la proue vous trouverez le quartier-maître Dieuzaide, l'œil vissé à son appareil photo, immortalisant ses collègues sous le Mistral provençal.  
Dans la cale, aux fers, sont consignés de mauvais sujets, prompts au “souffletage” et à l'emportement. Nous ne sommes pas sur le Bounty, mais la mutinerie n'est jamais très loin. 
Une légende de marins tenace veut qu'une femme à bord d'un bateau porte malheur. Il n'en est rien, en revanche j'ai entendu parler d'une habitante de Toulouse qui avait abrité en son sein un passager clandestin pendant plus de vingt ans.  
Vous rencontrerez ensuite nos gabiers qui drisseront la grand-voile pour prendre le vent marin ou vent d’Autan. Zephir si proverbial à Toulouse qu’on le trouve fréquemment représenté, notamment sur les murs du Capitole. 

C’est ce même vent qui, depuis des siècles, fait tourner les ailes des moulins de notre région. On pourrait croire, à l’aune de leur disparition, que d’aucuns ont passé leur temps à se battre contre eux, c’est d’autant plus vrai qu’ils font aujourd’hui leur réapparition sous la forme d’éoliennes.  
Pour finir, vous le savez, le capitaine est le seul maître à bord, mais il prend régulièrement le pouls de son équipage. C’est ce que nous faisons via une enquête auprès de notre public. Ainsi le clipper des archives pourra vous amener vers de nouveaux rivages. Hauts les cœurs moussaillons !  

Portrait en pied de M. C. Gueden’s professeur de patinage à l’Eldorado à Toulouse (150 allée de Barcelone), 1912, carte postale photographique. Marius Couret – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi7084.

Les rois du patin


janvier 2025

On a tendance à croire que la jeunesse à roulettes est un phénomène assez récent. Comment oublier les rollers et skateboards des années 1980 et à quel point les uns étaient nazes et les autres étaient cools. Vous préfériez être un patineur du bitume ou un surfeur des villes ? Eternelle querelle des Anciens et des Modernes, car les patins ne datent pas d'hier. En témoignent ces établissements toulousains de la fin du 19e et au début du 20e siècles proposant des pistes de patinage : le Kursaal, l'Eldorado, les Skating-Palais, Skating-National, Skating-Room et Skating-Ring, où les « skatineurs » et « skatineuses » s'en donnaient à cœur joie. Alors accrochez-vous à votre planche et préparez-vous à quelques tricks d'enfer exécutés par l'équipe d'Arcanes pour son 160e opus.

Nous débutons avec le Tony Alva du pyrénéisme, j'ai nommé Maurice Gourdon, dont la figure de prédilection, la photographie en extérieur, l'a conduit à transporter son matériel vers les contrées les plus inaccessibles, telles le Spitzberg.
Les aficionados du old school sauront ensuite apprécier un boneless d'école, littéralement « désossé » qui résonne étonnamment avec le supplice d'Ancien Régime de la roue consistant à briser les os d'un condamné. Que les riders qui ne se sont jamais rien cassé dans le feu de l'action me jettent le premier truck.

À ce sujet pas de tricks sans trucks. Pour des performances de champions, il faut un matériel d'exception. Aux Archives les roulements de nos chariots n'ont rien à envier à ceux des planches Powell-Peralta et autres Santa-Cruz. J'ai même vu quelques figures audacieuses dans les couloirs de notre bâtiment.
On en voit moins sur le famélique skate-park de la Terrasse installé à proximité d'un bâtiment singulier. Il s'agit de l'église du Christ-Roi conçue par les architectes Paul et Pierre Glénat et réalisée dans les années 1960. N'oubliez pas d'enlever vos patins avant d'entrer.
Peu de gens le savent, mais il existe aussi un skate-park à Rouvenac, village de la commune du Val-du-Faby (Aude) à laquelle appartient Fa où furent découvertes deux roues en bronze datant du début de l'âge du fer aujourd'hui conservées au musée Saint-Raymond. Deux roues, c'est peu, mais suffisant pour faire un wheeling.
Nous terminons avec un 360° ou tour complet de nos ressources généalogiques en ligne récemment enrichies par les actes d'état civil de l'année 1923 et les tables décennales de 1923-1932. On est encore loin du 900° de Tony Hawk, mais on s'en approche.

"Spuk im Spessart" ou train fantôme du Luna Park de l’île du Ramier, novembre 1965. Jean-Paul Escalettes – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 42Fi2969.

Massacre dans le train fantôme


décembre 2024

J’évite les fêtes foraines depuis que je ne porte plus de culottes courtes. Il s’en dégage une atmosphère un peu déprimante qui, pour moi, n’est pas étrangère au commerce du merveilleux. Un jour on réalise que les étoiles dans les yeux ce sont aussi des pépites dans les poches. Quelle désillusion !

Mais un jour aussi on se retrouve, on ne sait comment, dans le train fantôme d’un Luna Park éphémère. On se pince, mais on ne rêve pas, assis dans un wagonnet traversant une forêt de toiles d’araignées géantes, de squelettes cliquetants et de masques grimaçants, où résonnent rires hystériques et hurlements bestiaux. Hélas ! Un seul frisson vous étreint alors que votre mini-voiture passe brièvement au vu de tous et que vous croisez le regard d’une connaissance dans la foule. Vergogne ultime !


Mais laissons-là les démons du passé et pour les exorciser je vous invite donc au grand barnum du 159e numéro d’Arcanes.
Chères Mesdames, écarquillez bien les yeux devant l’interdit ! Un lieu dont votre sexe est banni depuis des siècles ! L’époustouflant photographe Louis Albinet va vous faire découvrir l’incroyable mont Athos où ne résident que des hommes.
Vous serez ensuite initiés par l’étrange Cazo-Bongo aux mystères des cinq vertèbres sacrées, autrement appelées sacrum (et des différents dégâts qu’on peut y faire). Sans oublier les pléthoriques et magiques reliques de saint Edmond le Martyr, de saint Symphorien et de saint Castor.
Quant aux plus jeunes, ils pourront défier les lois de la physique en utilisant l’extraordinaire machine à remonter le temps du professeur Candido-Negri. Ils assisteront ainsi à un ébouriffant défilé d’images fantastiques et argentiques venues des siècles passés.
Et devant vos yeux ébahis, dans la cour de l’hôtel de ville du Capitole, vous assisterez à la stupéfiante apparition du plus célèbre des suzerains de France et de Navarre en armure de combat. Suivez son panache blanc !
Vous ne partirez pas sans avoir rêvé aux mille feux de l’or maudit de Toulouse, immergé dans un lac sacré. Un consul romain l’a volé, l’infortune l’a poursuivi. Nombreux sont ceux qui ont perdu la raison en le cherchant.
Et pour finir, concentrez-vous sur ma voix, rien que ma voix et imaginez un monde singulier, un monde de chevaliers sans chevaux, de vaches volantes et de lapins tueurs. Vous y êtes, vous touchez le graal. Maintenant je vais compter jusqu’à trois et quand vous entendrez le chiffre trois vous vous réveillerez et vous aurez tout oublié de cet édito. Un, deux, trois...

Portrait d’un homme avec chapeau, années 1920, négatif N&B sur verre, 13 x 18 cm. Antonin Ruffié – Mairie de Toulouse, Archives municipales, 42Fi2.

Le feutre à la pogne


novembre 2024

L’autre jour j’ai vu mon pote Roger avec un drôle de feutre sur le crâne. « C’est un Homburg » qu’il me dit. Ça toujours été un excentrique le Roger, mais un expert du barbotage, d’où son blaze La Pogne. « Question exotisme, tu aurais pu faire mieux, sortir en fez, à l'orientale » que je lui réponds. Là, il rit jaune et je lui explique : « Mon Roro il n’y a qu’un seul couvre-chef pour les vrais bonhommes, les affranchis comme nous, c’est le Borsalino. Les autres galurins c’est pour les caves. Tu imagines Al Capone avec un béret ? » Alors faites comme Roger ouvrez bien vos esgourdes et filez doux, bicause je vais vous rencarder sur la 158e d’Arcanes.

Primo, on ne va pas vous causer du roi des gangsters, mais du roi des clichetoneurs toulousains : Jean Dieuzaide, alias le Boss, Yan, ou Monsieur Jean. Lui, quand il scribouillait quelque part, il utilisait toujours le même stylo. Gare à celui qui ne suivait pas les consignes...

Secundo et tertio, on va baragouiner bizness. Mornifle tarte et chourave, et c’est pas de la graille. Vous avez pigé ? La fausse monnaie et la fauche quoi ! Il faut croire que ça ne date pas d’hier vu qu’il y en avait déjà pas mal du temps des Bourbon. C’est dire !

Quarto, le Louis XV c’était aussi un rade près de la place Lucas tenu par un certain Oliveau. La spécialité du chef : la châtaigne ; le Marteau-Piqueur qu’on l’appelait. Aujourd’hui, il en reste que dalle, c’est tout le coin qui est passé au marteau-piqueur. Fallait faire place nette pour le nouveau quartier Saint-Georges.

Quinto, je ne radote pas question mornifle mais y’en a, et pas des moindres, qui auraient carrément jeté le bébé avec l’eau du bain, ou plutôt le présentoir avec la marchandise. Résultat : de la thune de collection dans la nature. Pas jouasse !

Sexto, Paulo Quat’Zyeux m’a donné un bath tuyau pour accéder de sa piaule à tout un tas d’informations sans lever le petit doigt. Le site internet des Archives de Toulouse que ça s’appelle. On y trouve même des trucs sur la boutique de doulos Brosson. Je leur tire mon chapeau à ces zigues !

Souvenir de Toulouse, vers 1910. Grands Magasins de Nouveautés "Au Capitole" (éditeur) - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi1010.

De mémoire et d’oubli


octobre 2024

La mécanique synaptique qui anime notre cerveau suit un double mouvement continu de mémorisation et d’effacement. L’un ne va pas sans l’autre. Si l’équilibre se rompt, la machine s’égare sur les chemins maladifs de l’amnésie ou de l’hypermnésie.
Nous, archivistes, petites cellules grises de l’encéphale sociétal, connaissons bien ce processus : trier, classer, détruire, pour mieux conserver la substantifique mémoire collective et la restituer au monde. Le numérique a, un temps, donné l’illusion qu’il était possible de tout conserver, d’autant plus dans un contexte d’injonctions mémorielles. Mais les faits sont têtus, pour pouvoir se souvenir, il faut aussi savoir oublier. Je vous invite donc à un exercice de mémoire tout à fait oubliable, ainsi qu’à un double hommage à Joe Brainard et à son zélateur français Georges Pérec, pour vous présenter le n°157 d’Arcanes.

Je me souviens de ces étranges lunettes de bois, posées sur la toile cirée à motifs de la cuisine de ma grand-mère, qui permettaient de voir des images stéréoscopiques en relief ; 

Je me souviens du terme “pierre morne” apparu au détour d’un texte, que j’avais trouvé autant obscur que poétique, avant de découvrir qu’il s’agissait du lieu d’exposition des cadavres à identifier sous l’Ancien Régime ; 

Je me souviens que l'archiviste qui organisait les ateliers des Samedis des Archives, Mort ou vif, Masterclass et Au fil des chroniques des capitouls, portait des chaussures en cuir noir siglées Christian Pellet, un must

Je me souviens d’avoir réalisé assez tard que le nom du quartier des Ponts-Jumeaux était effectivement lié aux deux ponts côte à côte traversant les canaux de Brienne et du Midi ; 

Je me souviens de la rue Mirepoix et de son restaurant de pâtes où je me rendais fréquemment sans aucune conscience des vestiges archéologiques qui se trouvaient à proximité ; 

Je me souviens d’avoir découvert qu’il existait des bibliothèques dans les services d’Archives, et inversement, sans en être pour autant bouleversé.

Portrait de Claude Nougaro vêtu d’un imperméable Blizzand, années 1960, carte postale publicitaire. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 9Fi5867.

Imper et passe


septembre 2024
Le temps passe... Il y a déjà vingt ans nous quittait Claude Nougaro. Petit taureau en imper. Impertinent, l’œil qui frise. Flambeur de film de gangster. Chanteur, fils de chanteur, entré au patrimoine de la Chansong. Passeur de mots.
Les archivistes, eux, sont parfois des passeurs de mémoire. Suscitant, au détour d’une visite de magasin, une révélation quasi mystique chez leurs disciples : Le Paradis, aurait dit le plus toulousains des chanteurs français.
Lui qui s’écriait Nous n’avons pas de passeport sur la bande originale du film L'Ordre et la sécurité du monde (Claude d’Anna, 1978) était aux antipodes d’Aimé Chapotin qui en possédait trois retrouvés sur son corps sans vie en 1741. Le fonds de la justice des capitouls en recèle bien d’autres provenant d’ici et d’ailleurs.
La musique de Nougaro voyageait, pareillement, de la France vers les autres continents, en aller-retour. Des mélodies passe-partout au sens noble, populaires, accessibles au plus grand nombre. Le passe-partout, en matière de conservation préventive, est aussi un moyen de rendre accessible. Mais il s’agit ici de présenter aux yeux du grand public des documents d’archives tout en les protégeant.
Ah, tu verras, tu verras, toi aussi lecteur d’Arcanes, tu verras des lacs, des fermes, des églises de Flourens et Montrabé apparaître sur le site Urban-Hist. Tu verras aussi une mystérieuse inscription surgir, puis disparaître à jamais, sur une façade de la cour Henri IV du Capitole. 
Et surtout, si tu viens aux Archives de Toulouse pour les Journées Européennes du Patrimoine les 21 et 22 septembre prochains, tu verras toutes sortes de choses étonnantes et inédites à commencer par les coulisses des Archives, mais aussi des ateliers, des expositions.  Et si tu n’es pas là, ne te morfonds pas, car dans un an de ça, tout recommencera, tu verras, tu verras...
Astrologue observant une étoile filante au moyen d'une longue vue, carte publicitaire en forme d'éventail de l'imprimerie Hector Labouche, seconde moitié du 19e siècle. Hutinet, D. (imprimeur) - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 14Fi386.

Nul mais prophète en son pays


juillet-août 2024

L’histoire a retenu les noms des prophètes des grandes religions et ceux dont les prédictions se sont réalisées, mais elle a oublié tous les autres. Et pourtant ce sont les plus nombreux : devins à la petite semaine, astrologues du dimanche, prospecteurs au doigt mouillé, ayant souvent en commun une nullité proverbiale. On recherche encore l’olibrius qui avait prédit la fin du monde pour le 21 décembre 2012 dont seul le pic de Bugarach, tel un moderne Ararat, devait réchapper. Plus prosaïquement, je me souviens aussi de cours où l’on nous expliquait doctement que les départements, en tant qu’échelons administratifs, vivaient leurs dernières heures. C’était il y a près de trente ans…

Tout le monde peut avoir son quart d'heure de nullité et les photographes n’échappent pas à la règle. Cela donne des clichés ratés, mais pas dénués d’intérêt. Nous vous en présentons un petit florilège qui va faire un tabac.
Tabac qui était très « prisé » sous l’Ancien Régime en témoignent plusieurs affaires judiciaires de l’époque que l’on pourrait résumer en ces termes : « Fumer c’est nul, mais sniffer c’est pire ».
En revanche, voter c’est très bien, même si parfois les bulletins sont nuls. Mais qu’advient-il de ces derniers après les élections ? Soyez rassurés, ils sont bien conservés.
C’est aussi le cas de la statue d’Héraklès archer réalisée par Antoine Bourdelle, ornant le monument aux sportifs morts durant la guerre 1914-1918. Vous pouvez aller l’admirer dans un écrin de verdure situé au bout du boulevard Lascrosses.
Les archéologues ne sont pas des héros antiques, mais ils se lancent souvent dans des travaux hérculéens et sont fréquemment confrontés à des énigmes dignes du Sphinx. Une opération de fouilles dans le quartier de Saint-Michel-du-Touch suscita ainsi de nombreuses questions.
Vos interrogations et recherches sont quelquefois infructueuses sur notre base en ligne. Ne vous découragez pas ! La vérité est ailleurs, quelque part dans nos fonds non référencés, dans un autre service de la Ville ou un autre service d’archives.

Affiche de la nuit sud américaine au Ramier, le 13 décembre 1956. Émile Godefroy - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 19Fi2289.

La nuit (sud)américaine


juin 2024
Avez-vous déjà remarqué, dans certains films, d’étranges scènes de nuit ? Des scènes où la lune semble briller très fort. Des scènes où vous vous faites l’effet d’un véritable nyctalope. Vous êtes alors probablement en présence d’une nuit américaine. C’est-à-dire d’une séquence filmée de jour qui par le truchement de filtres devient nocturne. J’ai longtemps cru que ce procédé avait quelque chose à voir avec le quart d’heure américain, cette parenthèse enchantée où les filles invitaient les garçons durant les boums. Mais, ils avaient simplement tout deux donné leur nom à des films en 1973 et en 1982. En revanche je n’avais jamais entendu parler de la nuit sud américaine qui s’est tenue le 13 décembre 1956 à la discothèque toulousaine Le Ramier.
Quatre ans plus tôt un autre évènement agitait les soirées toulousaines. Un concours, auquel participait Jean Dieuzaide, organisé par l’Association française des éclairagistes, promettait de récompenser le meilleur cliché d’illuminations nocturne.
Notons qu’en l’absence de ces dernières, l’obscurité est souvent propice aux crimes et exactions. Sous l’Ancien Régime, les soldats du guet veillaient à la tranquillité publique, du couvre-feu à l’aube, et l’on retrouve les procès-verbaux de leurs rondes dans nos fonds, soigneusement conservés.
D’ailleurs il y a des règles assez strictes pour que cette conservation soit la plus efficace possible. L’une d’elle consiste à  protéger autant que possible les documents de la lumière qui peut les endommager.
En parlant de protection, saviez-vous que l’hôtel du Grand Balcon, qui se trouve dans l’angle nord-ouest de la place du Capitole est protégé, au titre des monuments historique depuis 1999 ? Il faut dire qu’y a résidé l’écrivain et pilote, Antoine de Saint-Exupéry, créateur du Petit Prince : héros tombé des étoiles.
Les étoiles, certains en tombent, d’autres les scrutent. C’est le cas des Lanternistes qui constituèrent au 17e siècle la première académie savante toulousaine et frappèrent même médaille pour récompenser leurs membres les plus talentueux. Ils n’étaient pas les seuls et les archéologues métropolitains découvrent parfois des pièces du même type à l’occasion de fouilles.
C’est à un autre genre d’exploration que nous vous invitons pour finir. En effet, notre site internet vous permet d’accéder à des sélections thématiques, un éphéméride, des ressources généalogiques et bien d’autres choses encore. Mais n’y passez pas la nuit !
Reconstitution du double crime d’Ondes, 17 octobre 1972. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi1181.

Au nom de la loi


mai 2024

Un homme marche d’un pas décidé sous la galerie de bois d’une ville de l’Ouest américain de la fin du 19e siècle. Il porte, accrochée à son ceinturon, une Mare’s Leg – carabine Winchester 92 à canon et crosse sciés, ce qui laisse supposer qu’en plus d’être résolu, cet individu est dangereux. Il s’arrête devant un avis de recherche qu’il arrache. A l’écran se sur-imprime en grandes lettres « Au nom de la loi ». Ainsi débutait chaque épisode de la série suivant les pas de Josh Randall, chasseur de primes, interprété par la future star Steve McQueen, qui fut diffusée pour la première fois en France le 25 mai 1963.
Mais tandis que les vedettes d’aujourd’hui affluent sur la croisette cannoise, c’est vers un autre festival, toulousain celui-ci, que nous voudrions attirer votre attention. L’histoire à venir entre cette année dans sa 7e saison et devinez quelle en est la thématique ? "Au nom de la loi". Certes, le Kid de Cincinnati ne fera pas partie des invités, mais les Archives y participeront pour présenter des documents provenant de leurs fonds sur les thématiques "Traquer les criminels toulousains sous l'Ancien Régime" et "Les femmes face à l'épuration légale et extra-légale". Ainsi du 22 au 26 mai vous pourrez assister à de nombreuses rencontres faisant dialoguer diverses disciplines autour de ces règles qui charpentent notre société. Il nous fallait donc, à notre façon, parler loi, en y incluant les volatiles homonymiques, dans ce 153e numéro d’Arcanes.

Si elle était douée de parole Jeanne-Marie aurait pu, quant à elle, participer aux débats du festival en s'écriant, tel un Louis XIV emplumé, "L'oie c'est moi". Car elle appartenait effectivement à la famille des anatidés, mais elle était de surcroît la mascotte chérie du Toulouse Football Club. 
Francon, elle aussi chérissait ses palmipèdes enclos au sein du Collège de Foix mais elle eut maille à partir avec l'un des collégiats. Elle lui tint tête, et de même que nul n'est censé négliger ses oies, nul n'est censé ignorer la loi, cela se termina donc devant le tribunal des capitouls en 1745. Gageons que les protagonistes de cette histoire n'y laissèrent pas trop de plumes.
De plumes, il en sera question, et même plus que cela, pour évoquer nos ateliers d'écriture destinés au public scolaire. Les élèves peuvent y expérimenter la calligraphie à l'aide de ces ustensiles, voire  faire des concours de pleins et déliés.
En parlant de compétition nous poserons ensuite un regard historique sur la pratique du concours d'architecture. De nombreux bâtiments remarquables de Toulouse ont été construits ou restaurés dans ce cadre réglementaire devant permettre au meilleur projet de l'emporter. Ce fut le cas pour l'achèvement du Capitole en 1840 qui vit les deux tiers du bâtiment originel détruits, et contrairement à Rome il n'y eut pas d'oies pour le sauver.
Et pourtant il y avait bien des oiseaux à long cou dans la Tolosa antique si l'on en croit un dessin retrouvé sur une céramique gauloise conservée au Musée du Vieux-Toulouse. S'agissait-il du volatile en question ? 
D'ailleurs si vous aimez les énigmes et devinettes vous apprécierez sûrement notre jeu de l'oie concocté principalement à base d'archives que nous vous proposons en seconde main. Nécessité fait loi...

Exécution du parricide Jean Allières au Port-Garaud, 2 mai 1901. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 25Fi23 (détail).

Hache comme Histoire


avril 2024

En évoquant « L‘histoire avec sa grande hache », Georges Perec a créé, à l’instar de la Mort et de sa faux, une allégorie puissante : la grande Histoire venant trancher, souvent dramatiquement, le cours de la vie des petites gens. Guerres mondiales, civiles, révolutions ont toutes charrié dans leur sillage nombre de destins brisés, à commencer par les propres parents de l’écrivain.

Mais ce sont aussi les petites haches qui parfois font l’histoire, telle celle utilisée par Jean Allières, habitant de Labarthe-sur-Lèze, pour assassiner sa mère dans la nuit du 26 au 27 novembre 1900. Ce n’est pas tant l’horreur du crime ou l’attitude cynique du matricide, mais sa conséquence principale, à savoir le châtiment final, qui devait rester en mémoire. En effet, il donna lieu à la seule photographie connue d’une exécution publique à Toulouse. 

Nous évoluerons donc entre la grande et la petite histoire au fil de ce 152e numéro d’Arcanes en commençant par les mythiques escaliers d’Odessa, magnifiés par Sergueï Eisenstein, mais aussi, on le sait moins, immortalisés par le Toulousain Louis Albinet quelques années plus tôt, lors de la campagne d’Orient. 
Il sera ensuite question de bobards et autres affabulations de témoins qui émaillent les procédures judiciaires pour crime d’adultère dans la France d’avant la Révolution. En revanche, nul mensonge ne viendra entacher notre brève histoire de l’avènement des Archives en France. Seules certaines légendes seront un peu mises à mal. 

Ce ne sera pas le cas de la création mythique des Jeux Floraux à Toulouse, au début du 14e siècle, célébrée dans un tableau de Jean-Paul Laurens ornant l’escalier monumental de l’hôtel de ville.  A cette page d’histoire marquante peuvent s’ajouter toutes les autres pages constituant les Annales de la ville de Toulouse rédigées depuis la fin du 13e siècle jusqu’en 1787. Outre leurs chroniques annuelles, elles recèlent de nombreuses illustrations parfois très utiles aux archéologues.
D’ailleurs, même si nous fermons au public jusqu’au 27 mai prochain pour cause de travaux, tous les amateurs d’histoire et d’archives pourront néanmoins accéder à nos fonds via notre site internet, notre base en ligne et Urban-Hist. Dans l’attente de vous retrouver IRL [In Real Life].

Enfants jouant dans la cour de la maternelle du Béarnais, 17 septembre 1979, photographie N&B, 18×24 cm. Mairie de Toulouse, Archives municipales, 2Fi3513.

Les p’tits crapauds


mars 2024
Petit, j’aimais bien Kermit la grenouille, mais il a très vite  été détrôné par l’arrivée de Casimir en seconde partie de l’émission 1, rue Sésame. Ainsi, le dinosaure le plus sympa du PAF a raflé la mise et marqué plusieurs générations téléspectateurs français. Certes, ce dernier tenait plus du reptile géant que du batracien, mais ne sont-ils pas tous deux indéfectiblement liés à la jeunesse ?

Car je ne saurais expliquer pourquoi les bambins sont littéralement aimantés par les têtards, grenouilles et autres tritons. Sûrement un mélange de peur et de fascination, comme pour les tyrannosaures. D'ailleurs, à y regarder de près, le scénario de L'Île aux enfants est assez effrayant. Imaginez un groupe d'enfants séparés de leurs parents, isolés sur une île où sévit une bestiole préhistorique. On se croirait plus dans Jurassic Park que dans Oui Oui décroche la lune.

J’invoquerai donc votre âme juvénile pour aborder ce 151e numéro d’Arcanes en vous invitant d’abord à une chasse ranicole qui s’élargira ensuite à toutes sortes de produits de la nature, sous l’œil du jeune reporter Jean Dieuzaide.

Nous remonterons ensuite un peu plus loin dans le passé pour évoquer les perceptions météorologiques sous l’Ancien Régime. Elles varient, certes, dans le temps mais pareillement dans l’espace. Ainsi lorsqu’il y a de l’humidité dans l’air en Normandie, dans le Sud on appelle ça la pluie.

Quoi qu’il en soit, l’eau et les archives n’ont jamais fait bon ménage, car si nos têtes blondes aiment à patauger dans les flaques, c’est un peu moins le cas des archivistes. Pour prévenir ce type de déconvenues des travaux d’étanchéité sont actuellement en cours dans notre bâtiment. Ce qui est finalement assez logique pour un ancien réservoir.

Originellement construit en 1892, cet édifice faisait partie du système général d’alimentation en eau de la ville au même titre que les nombreuses fontaines publiques. Qui s’y intéresse pourra y découvrir, ici et là, des représentations grenouillesques.

De mon côté, je me souviens, enfant, avoir découvert sous quelques centimètres de terre, un gros crapaud vivant. L’expérience s’est avérée assez désagréable, contrairement, j’imagine, aux archéologues ayant fait une batracienne trouvaille sur le site gaulois de Vieille-Toulouse.

Et pour achever cette cure de jouvence, que diriez-vous d’un petit barbotage sur notre base en ligne ? Vous y pécherez sûrement quelques spécimens remarquables !
Supporters agenais dans les rues de Toulouse à l’occasion de la finale du championnat de France de rugby à XV entre Agen et Dax le 22 mai 1966, négatif N&B, 6 x 6 cm. André Cros - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 53Fi7667.

Teuf teuf !


février 2024
« Tiens tout a changé ce matin. Je n’y comprends rien. C’est la fêêête ! La fêêêêêête !» Eh oui, Michel ! Tu as cent pour cent raison, le 150e numéro d’ Arcanes mérite célébration. Et pour tout dire, j’ai bien envie, comme toi, d’enfiler une combinaison en satin rouge à col pelle à tarte, de me laisser pousser les cheveux et la barbe, pour danser et chanter au beau milieu d’un Big Bazar. Car il faut bien le reconnaître, la situation mondiale n’est pas au beau fixe. Honorons donc la newsletter des Archives comme il se doit. Et, même si depuis sa création en 2008, elle commence à avoir quelques kilomètres au compteur, on pourrait la comparer à ces vieux tacots customisés en roadsters dans les années 1950 par des ados en mal de sensations : un peu foutraques, assez amusants et coutumiers de la sortie de route. 
Mais empruntons d’abord l’autoroute de la jaille avec notre fête nationale que le publiciste Marius Bergé s’est plu à photographier durant l’entre-deux-guerres. Entre défilé militaire et compétition halieutique, courses hippiques et joutes sétoises, une mère n’y retrouverait pas ses petits, et pour cause, ils sont au concours de bébés organisé à cette occasion.
Nous vous inviterons ensuite à faire une pause sur l’aire « Corpus corporis » où, dans une ambiance moderne – pour ne pas dire d’Ancien Régime –, notre équipe vous fera découvrir les constats de chirurgiens réalisés à l’occasion d’affaires judiciaires.
Avant de repartir, si vous le souhaitez, vous serez briefés sur les règles à respecter pour conserver vos archives dans les meilleures conditions par notre responsable des fonds privés. Attention, tout contrevenant pourrait voir son don ou dépôt refusé.
La prochaine sortie vous mènera sur le chemin des écoliers, ou plutôt des écoles toulousaines, notamment celles réalisées dans les années 1920-1930 par l’architecte de la ville, Jean Montariol. D’aucuns pensent que le savoir est une fête, lui a fait entrer les salles des fêtes dans les établissements scolaires.
Votre paisible escapade pourra continuer à moins d’être interrompue par un défilé de bergers landais à échasses, ou de catalans dansant la Sardane. Vous serez alors tombé en plein Fénétra, manifestation folklorique locale qui pourrait trouver son origine, si l’on en croit des découvertes archéologiques, dans un culte funéraire.
Et votre grand tour s’achèvera en atteignant le Graal : les archives d’ Arcanes. D’un seul clic vous aurez accès aux thématiques les plus improbables, aux jeux de mots les plus éculés et aux éditos les plus capillotractés. De quoi, nous l’espérons, vous donner envie de continuer le voyage avec nous.
Statue d’Hercule, tombeau d’Henri II de Montmorency à Moulins (Allier), Michel et François Anguier, Thibaut Poissant, Thomas Regnaudin. 1649-1652. Cliché Gabriel Gay - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 51Fi1706.

Travail de dingue


janvier 2024
Herculéen, sisyphéen. Ainsi pourrait-on qualifier le travail des archivistes tant la tâche de collecter aujourd’hui la mémoire de demain paraît immense et parfois illusoire. En effet, est-il vraiment possible d’anticiper les tendances historiographiques des décennies à venir ? Qui aurait pu prévoir, au début du 20e siècle, l’explosion des gender studies que nous voyons actuellement ? Et pourtant, fort de nos connaissances archivistiques, nous essayons au quotidien d’assumer cette mission qui prend souvent un air d’éternel recommencement. D’aucuns pensent qu’il faut être un peu fou pour faire ce métier, je ne sais pas, mais passionné, il faut l’être assurément. Je vous invite donc à découvrir le sommaire du n° 149 d’ Arcanes préparé par des rédacteurs passionnés et passionnants.

Et comment mieux commencer, en matière d’enthousiasme bouillonnant et communicatif, qu’avec Maurice Gourdon. Amateur éclairé, pyrénéiste forcené, photographe éclectique, ses curiosités sont aussi multiples que ses domaines d’activités.
Il en est de même pour les femmes sous l’Ancien Régime sans pour autant que leur soit systématiquement accolé le mot « métier ». Et pourtant au fil des procédures criminelles apparaissent des charrieuses de charbon et autres plieuses et couseuses de livres.
Je ne sais pas s’il y avait beaucoup de plieuses ou couseuses de livre au sein de l’entreprise JOB, mais il y avait sûrement beaucoup de papier. Papier cigarette principalement fabriqué dans les usines de Perpignan, de la Moulasse (Ariège) et de Toulouse que vous retrouverez dans le fonds privé de cette société que nous conservons.
Mais JOB ce ne sont pas que des usines, il y a aussi un hôtel particulier situé boulevard de Strasbourg, faisant office de siège social où l’on trouve même un (faux) château médiéval.
Nous resterons ensuite au Moyen Âge avec les tribulations de deux chapiteaux romans représentant le prophète Job, entre leurs lieux - pas toujours certains - de découverte et leurs institutions de conservation. Si la parole leur était donnée, ils en raconteraient sûrement de belles. 

Pour certains, faire parler des pierres est parfois plus facile que de faire parler des personnes. Néanmoins, les Archives ont lancé des collectes de témoignages  auprès d’érudits, photographes, architectes, syndicalistes toulousains en leur permettant de partager leurs expériences. Plusieurs dizaines d’heures d’écoute et de visionnage sont à votre disposition sur notre site. Un travail herculéen, je vous disais !
Concert du groupe Toto à l’ancien Palais des Sports de Toulouse, mars 1999. Joachim Hocine - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 15Fi12505.

Toto, ma non troppo


décembre 2023
Je ne suis ni un héraut de la météo, ni cynique au point d'ironiser sur la situation dramatique qu'ont connu récemment le Kenya et la Somalie, néanmoins « Je bénis les pluies qui tombent sur l'Afrique ». La traduction de ces quelques mots extraits du tube planétaire de Toto Africa, nous replonge dans les années 1980. Considéré par certains comme un sommet de la pop-rock FM, ce titre débute par un incipit musical devenu presque aussi célèbre que celui de la 5e symphonie de Beethoven. Et pourtant, bien que ce groupe américain se soit produit à plusieurs reprises à Toulouse, comme le prouve ce cliché de 1999, je ne suis jamais allé le voir en concert. L'explication est simple, j'aime bien Toto, mais pas trop. En revanche j'adore le n° 148 d'Arcanes et ses chroniques.
Car les tubes ne se chantent pas seulement, on peut aussi les enfoncer dans le sol pour forer du gaz ou du pétrole. Avec sa maestria et son intrépidité légendaires Jean Dieuzaide réalise des clichés vertigineux dans le cadre de reportages et de commandes pour ses clients de la prospection d'énergies fossiles telle la RAP ou de la SNPA.
La SNPA qui n'est pas la Société nationale protectrice des apprentis qui, si elle avait existé, aurait eu fort à faire avec les maîtres boulangers de l'Ancien Régime tant ils avaient, semble-t-il, la main leste. C'est du moins ce qui apparaît dans les procédures criminelles de l'époque.
On aurait d'ailleurs pu crier au crime lorsque l'acteur-producteur bodybuildé Arnold Schwarzenegger repris en main le projet d'adaptation cinématographique d'une nouvelle de Philip K. Dick qui courrait depuis les années 1960. Grand mal nous en aurait pris car le résultat Total Recall fut un succès populaire et critique qui inspire même les archivistes d'aujourd'hui.
Je me souviens encore de la sortie en salle du film à l'époque où nous étions toute une bande de jeunes a hanter les troquets du « Ouest-Side » toulousain. Parmi eux il y avait la « Bier Akadémie » de Cornebarrieu, bien connue des Allemands d'Airbus. Mais il y a tant d'autres choses à voir dans cette dernière commune, dont le diagnostic patrimonial vient d'être achevé et consultable sur UrbanHist, ne serait-ce que ses châteaux.
Cependant, même si Cornebarrieu a de nombreux atouts elle ne fut pas sélectionnée pour figurer dans la publication « Les 100 villes qui ont fait l'occident » éditée en 1980 sous le patronage de l'entreprise Total. En revanche, c'est le cas de Toulouse et d'un intéressant relevé archéologique conservé dans nos fonds.
Et tandis que l'année s'achève, ainsi que cet édito, vient l'heure du bilan. On ne va pas vous faire la totale, mais sachez que les mois passés ont été bien remplis et que pour ceux à venir nous resterons à votre totale disposition tant sur notre site qu'en salle de lecture.
Cabinet d'Eugène Trutat place du Salin, 1894, négatif N&B sur verre, 13 x18 cm. Eugène Trutat - Mairie de Toulouse, Archives municipales, 51Fi193.

Visite des tas


novembre 2023

Le premier contact avant la prise en charge d'un fonds est parfois décourageant devant l'ampleur de la tâche. Que celui qui ne s’est jamais retrouvé au milieu de piles d’archives poussiéreuses, dans un ordre tout relatif, me jette la première boîte Cauchard. Je ne connais pas de professionnel du secteur n’ayant une anecdote sur ces « visites des tas » à raconter, mais aujourd'hui je serais plutôt enclin à vous parler des tas de visites auxquelles vous convie le numéro 147 d’Arcanes.
Tout d’abord celles, officielles ou touristiques, qui ont été immortalisées par des photographes toulousains. Du Bey de Tunis au Prince Philip, de la lagune vénitienne au Pallazzo Vechio florentin, vous voyagerez dans le temps et l’espace tel un Doctor Who en archivistique.
Vous suivrez aussi les pérégrinations du syndic des visites, sorte d’inspecteur de l’hygiène au sein des abattoirs de la ville au 17e siècle qui, à l’occasion d’une épizootie, est chargé de publier un arrêt du parlement dans les villes de Gascogne et Languedoc.
Plus près de vous, sans être pour autant plus accessibles, les magasins d’archives habituellement interdits au public pour des raisons de conservation et de sécurité, s’ouvrent tout de même une fois par an pour des visites lors des Journées européennes du patrimoine.  
Mais peut-être préférez consacrer vos week-ends à d’autres activités. Pourquoi ne pas aller voir un parent âgé, et pour ce faire, emprunter un parcours jalonné d’édifices remarquables dans le quartier de la Côte-Pavée ? Toutefois, si vous portez votre manteau rouge, méfiez-vous de n’être suivi par une personne peu recommandable.
L’évêque, lui, devait être tout de violet vêtu lors de ses visites pastorales, dont les notes sur l’état des églises constituent une source non négligeable de l’histoire de ces édifices sur lesquels travaillent les archéologues. Plus prosaïquement, ces derniers sont généralement affublés de vestes de sécurité fluorescentes, notamment lors des journées portes ouvertes où ils vous accueillent sur des sites fouillés ; ce qui peut créer une confusion en cas de visite de gilets jaunes.
Si vous préférez rester chez vous, en pilou-pilou, les Archives peuvent néanmoins venir à vous. Des reportages sont à votre disposition sur notre site pour admirer notre superbe bâtiment et rencontrer notre sympathique équipe. Mais que cela ne vous empêche pas de venir nous voir en vrai (on est mieux).