L'image du moi(s)


Chaque mois, petit billet d'humeur et d'humour à partir d'images conservées aux Archives. Forcément décalé !

Image du moi(s) - année 2014


poilus brigade police municipale toulouse clémenceau
Brigade d'agents cyclistes de la police municipale de Toulouse, 20 avril 1904. Retirage contemporain d'une photographie collée sur carton, 17,3 x 23,7 (photo), 23,5 x 30 cm. (carton). Archives municipales de Toulouse, 3 Fi 682.

janvier 2014


2014 : l'année des poilus
Quelques heures avant le réveillon du premier de l'an 1908, un décret, pris à l'instigation de Georges Clemenceau alors Président du Conseil et Ministre de l'Intérieur, créait les douze brigades régionales de police mobile passées à la postérité sous le nom de « Brigades du Tigre ». La postérité a moins retenu la brigade d'agents cyclistes de la police municipale de Toulouse qui sévissait pourtant depuis 1904. Vingt-quatre agents de la paix triés sur le volet et ne croyez pas que les critères de sélection étaient moins sévères que ceux de la police nationale. En terme de moustache ils étaient aussi exigeants.
Célébrons dignement cette année le 110e anniversaire de la création de cette brigade à la pilosité irréprochable.
Affiche publicitaire pour la revue "Couqui d'Aouta" (coquin d'Autan) de MM. Janot et Roux-Guy qui a été présentée à partir du 3 mars 1896 au Théâtre des Nouveautés, affiche Nirf, K. (dessinateur), Imprimerie Cassan fils, Toulouse, 1896, lithographie, 113 x 130 cm, AMT, 10Fi148

février 2014


Cookie d'aoûtats

Qui connaît « Couqui d'Aouta » ?

Non, il ne s'agit pas d'une nouvelle comédie musicale ayant pour thème l'entomophagie. Même si des cookies d'aoûtats pourraient faire saliver certains gastronomes en mal de sensations. En outre, on a déjà vu des comédies musicales avec des arguments plus ténus.
Non, l'origine de ce spectacle au titre fleurant bon l'occitan est à chercher en février 1895.
A cette époque MM. Paul Janot, Edmond Lanave et leur collaborateur César Roux Guy  présentaient au Théâtre des Nouveautés un spectacle intitulé « Coucou Revue » mettant en scène des personnages déambulant à travers la Ville Rose, de la place du Capitole au Faubourg Saint-Cyprien avec force danses et chansons. Grand succès, plus de 50 représentations.
L'année suivante ils recommencèrent et ainsi naquit « Couqi d'Aouta » (coquin d'Autan) autour des frasques de ce vent qui fait tourner la tête des Toulousains. On reste tout de même perplexe en apprenant que l'une des scènes principale avait étrangement pour cadre une exposition de pisciculture.

Dessin pour le costume de "La Fatigue (ou la peur)" du ballet de Marcel Landowski "Abîmes" créé en France au Théâtre du Capitole le 18 novembre 1967. Argument, décors, costumes et mise en scène de Yves Bonnat, gouache, 50 x 32 cm. Archives municipales de Toulouse, 20 Fi 694.

mars 2014


Planète rouge

Quel est le mois de l'année où finit l'hiver ?
Qu'est-ce qui est rond, rouge et qui menace la Terre ?
Qui est-ce qui est grand, fort et toujours vénère ?
Quelle est cette créature surgie de l'Enfer ?

Le mois de mars, la planète Mars, le dieu Mars et heu… Mars-tine contre Fantômette ? Pour le dernier je ne suis pas sûr. Peut-être une Batwomen française. Ça ne doit quand même pas être drôle tous les jours d'avoir un serpent autour du cou et du sein droit. Comme quoi, être un super héros peut être parfois super pénible.
Mais il semble que je me sois complètement fourvoyé. Il s'agit d'un personnage du ballet « Abîmes » de Marcel Landowski, sur un argument de Yves Bonnat, créé pour la première fois en France le 18 novembre 1967 au Théâtre du Capitole, racontant les pérégrinations de trois explorateurs dans les entrailles de la Terre à la recherche de la source de vie : l'Eau. Effectivement ça n'a pas grand-chose à voir avec la cousine de Batman, mais convenez que le costume du personnage incarnant « La fatigue (ou la peur) » peut prêter à confusion, ne serait-ce que dans sa dominante rouge. Dominante qui sera aussi mise à l'honneur en ce mois de mars par la Biennale Passage(s) Design, Arts & Transmission en collaboration avec les Archives.

Immeuble 1 allées Charles-de-Fitte, vers 1932, négatif N&B sur verre, 18 x 24 cm. Archives municipales de Toulouse, 57 Fi 55.

avril 2014


Passion d'avril

J'aime bien avril. Les jours s'allongent comme s'ils étaient à la plage. C'est comme si l'été, bien qu'il soit encore loin, nous envoyait quelques rayons de soleil pour nous demander d'être patient. Tout serait presque parfait s'il n'y avait le 1er avril.

Ça sert à quoi de faire une journée de la blague alors que l'on baigne dans l'humour et la dérision. A la radio, à la télé et surtout sur Internet nous sommes envahis par les calembours, l'impertinence, le second degré, les « fakes », les « hoax » et j'en passe. Ne faudrait-il pas mieux instituer une journée du sérieux ? Pas de blague pendant un jour. Ça serait dur, mais peut-être salutaire. Ne serait-ce que pour faire dégager les clowns des hôpitaux. Déjà être un enfant malade, ça n'est pas drôle, mais en plus quand Bozo vient te torturer dans ton lit ça devient cauchemardesque.

Plaçons donc ce mois d'avril sous le signe de la gravité. Voici 81 ans la bibliothèque municipale de la rue de Périgord était ouverte au public. Les Archives de la ville y ont d'ailleurs séjourné de 1945 à 1995. Son auteur, Jean Montariol, fut l'architecte de la ville de 1927 à 1949. Il est l'auteur de nombreux autres bâtiments remarquables tels que le parc des sports sur l'île du Ramier, la Bourse du Travail place Saint-Sernin, de nombreuses écoles (Jules-julien, Ernest-Renan, Fabre, Bonhoure, etc.). Il a aussi œuvré pour l'office des HBM (ancêtre des HLM) de Toulouse pour lequelle il a réalisé plusieurs cités dont celle située au début des allées Charles-de-Fitte visible à l'image.

Cette dernière fait partie d'un fonds de 162 photographies achetées par les Archives en 2013 représentant des édifices conçus par Jean Montariol et reproduisant certains de ses plans. Le fonds sera mis en ligne dans le courant de l'année 2014.

Bon-point publicitaire reproduisant un portrait en buste de l'exploratrice et archéologue Jane Dieulafoy, née Magre, et une scène montrant l'exploratrice aux prises avec des indigènes sur les rives de la Kercha en Perse en 1885, début XXe siècle, chromolithographie, 7,2 x 10,5 cm, AMT, 14 Fi 430

mai 2014


En mai, Jane fait ce qu'il lui plaît
Suse, certains la boivent (mais qui, à part ma grand-mère ?), d'autres la fouillent. Jane Dieulafoy appartient à la seconde catégorie. Ce mois de mai 2014 où nous célébrons le 98e anniversaire de son décès, me donne l'occasion de lui rendre hommage. Cette Toulousaine au caractère bien trempé, passionnée d'histoire de l'art et d'archéologie, a connu un destin hors norme. Née Magre, elle épouse l'ingénieur Marcel-Auguste Dieulafoy en 1870. Lorsque ce dernier part sous les drapeaux durant la guerre franco-prussienne, plutôt que de rester seule, éplorée à l'attendre, elle part à ses côtés déguisée en franc-tireur.
Ces deux là ne vont plus se quitter. Au fil de leurs pérégrinations à travers la Perse, elle va prendre l'habitude de se travestir en homme. Habitude qu'elle conservera à son retour en France. Elle écrira de nombreux récits de voyages, romans et études historiques. On doit au couple un inventaire impressionnant des richesses architecturales de la Perse. De 1883 à 1885 ils ont notamment participé aux fouilles de la cité de Suse.
Le bon point ci-contre représente un épisode des tribulations de l'exploratrice sur les bords du fleuve Karkheh en Iran. La légende à beau préciser « Mme DieulaFoy en danger », connaissant le personnage, je n'aimerai pas être à la place des indigènes.
Carte postale éditée à l'occasion de la kermesse de la préfecture de la Haute-Garonne au profit des région libérées représentant un trou d'obus au fort de Troyon après les bombardement allemands de septembre 1914, 1920, phototypie, 9 x 14 cm, Archives municipales de Toulouse, 9 Fi 5293

juin 2014


Juin, c'est la fin
Alors que tous les enfants attendent l'arrivée du mois de juin avec impatience, leurs parents, eux, la redoutent. On peut comprendre nos chères têtes blondes anticipant avec plaisir ces dernières semaines d'école où ils pourront faire à peu près tout ce qu'ils veulent (sauf travailler). Mais on doit aussi saisir l'angoisse croissante des pères et mères face à l'inéluctable et tant redoutée kermesse des écoles.
Kermesse est un mot d'origine hollandaise, c'est déjà un peu triste, qui signifie « messe de l'église » ce qui n'est pas moins déprimant. L'expérience prouve que ce type de réjouissance à bonne humeur obligatoire, où se côtoient spectacles désastreux et attractions foraines de seconde zone, a souvent un effet inverse sur ses participants. Ainsi, même le petit bout de chou déguisé en lapin blanc qui sautille dans un coin de la scène semble s'interroger sur le sens de toute cette débauche d'énergie. Il y a une raison à cela : les enfant sont de piètres artistes. Acteurs calamiteux, musiciens approximatifs, danseurs catastrophiques… Pour paraphraser le peintre Salvador Dali je dirai qu'il y a une chose encore plus détestable que les enfants ce sont les spectacles d'enfants.
Certes le programme de la kermesse de la préfecture de Haute-Garonne des 12 et 13 juin 1920 au profit des régions libérées ne prévoyait pas de telles attractions, mais ne doutons pas qu'elle fut aussi sinistre qu'un spectacle de clown à l'arrêt d'un feu rouge. Il n'est qu'à voir l'illustration choisie pour la carte postale, un trou d'obus au fort de Troyon, pour s'en convaincre. L'honnêteté intellectuelle me dicte de préciser qu'il s'agissait d'un hommage à la résistance héroïque de ce bastion en septembre 1914.
Etiquette destinée à orner la boite du jeu de société "Le football de salon" représentant une action de jeu de rugby mettant en scène des jeunes garçons, vers 1905, Saussine éditeur, Paris, lithographie, 45,5 x 56,5 cm. Archives municipales de Toulouse, 20 Fi 222.

juillet - août 2014


Qu'est-ce que tu fais pour les vacances ?

Question rituelle de ce mois de juillet qui peut s'avérer lassante à la longue, surtout si on ne fait rien. Afin de ne pas se laisser gagner par l'amertume imaginons une activité simple et amusante à pratiquer chez soi durant la période estivale.

Pour ma part je trouve que l'étiquette de ce jeu de société du début du XXe siècle intitulé : « Le football de salon » est assez suggestive. Même s'il s'agit à l'origine d'un jeu de rugby de table, l'association des mots « football » et « salon » évoque immanquablement pour moi des vases chancelants, de verres brisés, des sentences parentales comminatoires, des cris de voisins excédés, des aboiements de chiens et des confiscations de balle ou ballon. L'enfance quoi !
En cette période de Coupe du Monde je vous propose donc de pratiquer le football de salon aussi appelé « sallamangéball » par nos amis brésiliens. Contrairement à ce que son nom indique ce sport peut se jouer dans n'importe quelle pièce de votre maison ou appartement. Vous aurez d'abord besoin d'une petite balle qui ne doit pas dépasser le diamètre de la main et rebondir suffisamment, mais pas trop non plus. Vous vous mettrez ensuite en quête d'un partenaire ;  ce dernier peut être humain ou canin, même un enfant peut faire l'affaire. Il vous suffira ensuite de projeter la balle contre le mur vers votre partenaire qui lui-même devra vous la renvoyer. C'est simple et amusant.
Pour plus d'information sur les règles de jeu contactez la Fédération Française de Salamangéball dans le salon de l'hôtel de ville de Trécon (Marne). Ce sport étant en cours d'homologation tout retour d'expérience de votre part sera la bienvenue, toutefois la FFS décline toute responsabilité en cas de destruction de mobilier ou d'altercation de voisinage.

Vue du quartier Saint-Cyprien depuis le quai de Tounis (dôme de La Grave, Hôtel-Dieu, pont Neuf, Château d'eau, Église Saint-Nicolas, arc de triomphe), vers 1855, photographie N&B, 40 x 60 cm, tirage du calotype original réalisé par Jean Dieuzaide. Archives Municipales de Toulouse, 26 Fi 166

septembre 2014


La ville argentique

Les rentrées du mois de septembre me donnent de l'urticaire. Mon médecin a beau blâmer les aoutats, je sais à quoi m'en tenir : je suis allergique aux rentrées. Et cela ne date pas d'hier. Ça a commencé enfant avec la rentrée scolaire ; de mauvais souvenirs qui me hantent encore aujourd'hui. Pour mon malheur, ce traumatisme est entretenu par la manie de nommer systématiquement tout évènement se déroulant en septembre « rentrée ». Ainsi les rentrées politique, littéraire, sociale, médiatique, cinématographique. On s'étonnerait presque que personne n'ai évoqué « une rentrée terroriste mouvementée » lors des attentats du 11 septembre.

Pour échapper à ces tristes évènements je vous propose donc de partir à la découverte d'une cité d'argent. Il ne s'agit pas d'une ville mythique telle El Dorado que cherchèrent en vain les conquistadors espagnols, ou d'une localité installée sur les bords du Rio de la Plata qui irrigue la bien nommée Argentine. Cette ville c'est Toulouse et sa couleur lui est donnée par le nitrate d'argent, si décisif dans la découverte des premiers procédés photographiques.

On associe volontiers Toulouse à la brique, au rugby, au cassoulet, à l'aéronautique, mais moins à la photographie. L'histoire nous prouve qu'elle a eu une importance indéniable dans ce domaine. Dès septembre 1839 des clichés de la ville sont réalisés par les opticiens Bianchi. Des studios photographiques Belloc, Trantoul, Thalamas se montent dans les années 1840-1850. En 1875 est fondée la Société de Photographie de Toulouse par Charles Fabre et Eugène Trutat. Ce dernier mettra en place le premier cours municipal de photographie de France en 1898 qui eu l'honneur d'être filmé par les opérateurs Lumière. Alors que des grandes maisons ont pignon sur rue (Provost, Massip, la Photographie Toulousaine) le 20e siècle voit apparaître de nouveaux talents tels Germaine Chaumel dans les années 1930 et Jean Dieuzaide dans les années 1950. Fondateur de la Galerie Municipale du Château d'eau en 1974, ce dernier a réalisé le tirage de l'image que vous pouvez voir. Elle est éminemment symbolique de la vocation photographique de la ville. Réalisée sur calotype, négatif papier, dans les années 1855, elle a été tirée par Jean Dieuzaide à l'occasion d'une exposition en 1978. La boucle est bouclée.

« Déridons le Front. Revue. En coulisses, on habille les danseuses », département de la Meuse, 1915, photographie N&B, 9 x 14 cm, Archives municipales de Toulouse, 74 Fi 36.

octobre 2014


Les bidasses se font l'octobre
Que serait l'humour français sans le comique troupier ? Drôle peut-être. Cependant ne soyons pas trop sévère avec ce genre du music-hall où de nombreux artistes se sont illustrés : Fernandel, Raimu, Fernand Raynaud, etc. Parmi les films populaires français il en est de nombreux qui ont exploité ce filon : Les gaités de l'escadron, Les dégourdis de la 11e, Général… nous voilà ! , Les bidasses en vadrouille, Arrête ton char… bidasse et j'en passe ; sans oublier la série de la 7e Compagnie où l'illustra l'inénarrable Jean « donne ton falzar » Lefebvre.

Mais de nombreux artistes qui ont fait les grandes heures de ce genre ne sont plus guère connus. Qui se souvient aujourd'hui des Ouvrard père et fils, de Dranem, Bach, Blon D'hin et de Polin ? Ce dernier avait choisit pour sujet de l'une de ses chansons une héroïne qui aurait pu en remontrer aux poilus de la Grande Guerre : « Elle a d´la barbe, Philomène / Elle ressemble à mon capitaine (…) / C´est bien planté, c´est pas fragile / Y en a autant en haut qu´en bas / Elle n´est pas belle, c´est inutile / Elle s´rait jolie qu´on l´verrait pas ».

Philomène avait probablement de nombreux points communs avec les danseuses que nous pouvons voir sur ce cliché pris dans les coulisses de la revue du théâtre aux armées "Déridons le Front" en 1915. Il fait partie d'un fonds donné aux Archives municipales par Philippe Lebely à la suite de la Grande Collecte de documents de la guerre 1914-1918. 
A l'image on peut voir Marcel Montel, grand-père maternel du donateur, qui fixe le tutu du chansonnier Henri Martini en présence du comédien Lucien Baroux qui faisait ses débuts.
Photographie d'une vue peinte du projet de monument aux morts de la guerre 1914-1918 du cimetière de Salonique proposé par Jean Montariol à l'occasion du concours lancé par la Ville de Toulouse en novembre 1920, négatif N&B, 18 x 24 cm, Archives municipales de Toulouse, 57 Fi 1

novembre 2014


Novembre, l'erreur monumentale
Lieux de mémoire par excellence les monuments aux morts de la guerre 1914-1918 font aujourd'hui l'unanimité. Pourtant leur érection durant l'entre-deux guerre fut parfois l'occasion de violentes oppositions. Certes, tout le monde était d'accord pour commémorer les soldats morts pour la France en revanche les avis différaient sur la manière de le faire. Certaines inscriptions pacifistes ou bellicistes suscitèrent l'ire des uns, certaines représentations la colère des autres. Ainsi la Victoire « avachie » du monument aux combattants des allées Forain-François-Verdier indisposa tellement qu'une association se créa pour demander sa destruction.

Il faut reconnaître que les monuments commémoratifs créés durant cette période peuvent avoir une valeur artistique assez faible. Travaillant pour une bonne cause, certains créateurs se sont crus exempts de créer une « bonne » œuvre. Une véritable industrie lucrative s'est ainsi développée à travers le pays. 

En novembre 1920 la mairie de Toulouse lança un concours pour la réalisation d'un monument aux morts de la Ville au cimetière de Salonique. Nous pouvons voir ici  la proposition du jeune Jean Montariol qui ne fut heureusement pas retenue. Loin de moi la volonté de mettre en doute le génie du futur architecte de la ville, auteur de très beaux bâtiments tels que le parc des sports, la bibliothèque municipale, mais il faut reconnaître que l'idée de cette urne géante est pour le moins singulière, pour ne pas dire incongrue. 

Ce n'est pas tant le sujet, quel meilleur théâtre qu'un cimetière pour une urne funéraire, que sa dimension qui est en cause. L'aspect géant de la chose évoque plutôt le domaine publicitaire, telles une saucisse ou une choppe de bière gigantesques vantant les attraits d'une brasserie, on pourrait voir dans cette urne hors proportion une réclame pour un magasin de pompes funèbres.  Rendons hommage aux édiles qui, sûrement pour des raisons plus économiques qu'esthétiques, nous épargnèrent cette erreur monumentale.
Photographie d'un groupe de dix militaires debout posant devant une table où sont disposés des ustensiles de cuisines et des victuailles, 17 octobre 1915, carte postale photographique N&B, 9 x 14 cm, Archives municipales de Toulouse 1 Num 11/1.

décembre 2014


Vous reprendrez bien du singe ?
La nourriture est l'une des obsessions du soldat mobilisé. Il faut dire que la guerre de mouvement de l'automne et l'hiver 1914 n'a pas facilité l'approvisionnement. De plus, dans les premier mois, l'armée française n'étant pas équipée de cuisines mobiles, le poilu est encombré de toute une batterie d'ustensiles qui n'ont rien de militaire. Il dispose de rations de réserve composées de sachets de soupe condensée, de « corned-beef » en boite de conserve, aussi appelé « singe », de biscuits si durs qu'ils peuvent servir de cale sous les meubles, de sucre et de café. La popote commune se fait à la fortune du pot, avec ce que l'on récolte ici et là dans les zones abandonnées par la population. Dans ce cadre, l'ennemi principal du soldat est avant tout le rat, grand chapardeur de vivres. 

Avec l'arrivée de l'hiver et du froid, la situation se dégrade sensiblement. Ce sont donc des soldats épuisés, mal nourris qui s'apprêtent à passer Noël sur le front. A cette occasion, ils se sentent assurément plus proches des « Fridolins » qui partagent les mêmes conditions de vie de l'autre côté des barbelés, que de leurs compatriotes restés à l'arrière. La trêve des confiseurs, qui n'a jamais mieux porté son nom, est pour certain l'occasion de fraterniser en échangeant poignées de main, cadeaux et friandises au lieu de coups de feu et autres tirs de mortier. Ce phénomène, vu d'un mauvais œil par les différents états-majors, fut significatif en 1914, particulièrement sur le front Belge entre les troupes allemandes et anglaises.

Le fichier numérique du cliché présenté ici a été intégré dans les collections des Archives municipales de Toulouse dans le cadre de la grande collecte de documents sur la première guerre mondiale.