L'image du moi(s)


Chaque mois, petit billet d'humeur et d'humour à partir d'images conservées aux Archives. Forcément décalé !

Image du moi(s) - année 2023


Carte postale célébrant le titre de champion de France du Stade Toulousain en 1912, chromolithographie, 9 x 14 cm. J. M. Degeilh – Mairie de Toulouse, archives municipales, 9Fi5420

mars 2023


En rouge et mars
Le 31 mars 1912, le club de rugby du Stade Toulousain remportait son premier titre de champion de France et débutait ainsi une longue marche qui allait l’emmener vers le palmarès le plus brillant du rugby européen. Jugez-en : 37 titres au total, dont 21 de Champion de France, 5 coupes d’Europe de rugby. Pour ne parler ici que des résultats de l’équipe première.
Mais cette année 1912 devait avoir une saveur toute particulière car ladite équipe était demeurée invaincue tout au long de la saison. Forteresse imprenable, ne s’étant inclinée lors d’aucun match, tant officiels qu’amicaux, elle fut en conséquence baptisée « La Vierge Rouge ». Les illustrateurs ne se firent pas prier pour l’incarner sous les traits d’une jeune fille, parfois vêtue de rouge, parfois pas vêtue du tout, et affublée – pour une raison mystérieuse – du sobriquet « Zézette ».
Loin de moi l’idée – très en vogue ces dernières années – de regarder avec condescendance nos aïeuls, mais reconnaissons qu’en associant les termes « vierge », « rouge » et « zézette », ils ont vraiment fait carton plein. D’autant qu’aujourd’hui, même les hagiographes de l’autre « Vierge Rouge », la communarde Louise Michel, sont accusés d’avoir créé et diffusé ce nom de guerre présentement jugé dévalorisant pour la mémoire de la célèbre insurgée. En parlant mémoire et d'inssurection, j’en profite pour signaler que le 25 mars prochain nous célébrerons le 152 e anniversaire de la proclamation de la Commune à Toulouse.
Capitole, 1842, planche lithographique extrait de Toulouse Monumentale et Pittoresque par Jean-Mamert Cayla et Paul Cléobule. Perrin (dessinateur), Achille Delor (graveur) – Mairie de Toulouse, Archives municipales, RES111 pl. 5.

février 2023


Février 2.0

Au début des années 2000, on donna aux nouvelles évolutions qui transformaient le World Wide Web, le nom de Web 2.0. L’expression, bien qu’issue de la culture geek, séduisit un large public. A tel point qu’on la retrouva utilisée dans des domaines divers et variés. Ainsi, on peut essayer d’imaginer le management 2.0 ou la ville 2.0, mais qu’est-ce qu’une mère 2.0 ? Une « intrapreneure d’un programme d’acculturation digitale pour tous » qui suit avec « curiosité l'usage des nouvelles technologies de sa fille » ? Ou juste une maman qui revend ses vêtements sur Internet et espionne son ado sur les réseaux ?
On peut y voir un symptôme du présentisme qui tente de qualifier la nouveauté d’une façon toujours plus absconse. L’usage du jargon technico-informatique est caractéristique à cet égard, mais aussi périlleux car il se périme très vite. Alors que l’actualité est au Web 3.0, j’entendais récemment une ex-gloire des années 1980 qualifier George Michael de « Frank Sinatra 2.0 ». Ok boomer ! T’as raté tellement de trains que plus personne ne peut t’aider, et t’accrocher aux wagons de la modernité restés en gare ne va pas arranger ton cas.
En revanche, Toulouse était au rendez-vous de l’Histoire le 25 février 1848, lorsque fut proclamé, depuis le balcon de l’hôtel de ville du Capitole, l’avènement, non pas de la République 2.0, mais bien de la Seconde République. Certes, elle ne dura que quelques années mais, comme son nom ne le laissait pas présager, sema les graines d’une troisième qui, à la fin du 19e siècle, devait installer durablement un régime démocratique en France. Il y a eu plusieurs mises à jour depuis cette époque, et parfois les installations des nouvelles versions ont bien failli faire planter le système. Néanmoins, il tourne toujours à l'heure ou j'écris ces lignes.

Boulangers au bureau de bienfaisance de Toulouse, 1938-1940, négatif N&B, 9 x 12 cm. Marius Bergé – 85Fi681

janvier 2023


Four de l'an
Dans la France du Grand Siècle, lorsqu’un spectacle ne rencontrait pas son public, on préférait annuler la représentation. Les lustres n’étaient pas allumés et la salle demeurait dans l’obscurité la plus profonde ; il y faisait noir comme dans un four. Ainsi naquit l’expression « faire un four » chez les comédiens, qui s’est ensuite popularisée pour caractériser un gros ratage ou  un échec retentissant.
En ces temps de bilan, nous pourrions donc placer l’année 2022 sous le signe du four. Diplomatique d’abord, militaire ensuite, mais aussi climatique, tant littéralement que littérairement pour cette dernière occurrence. Ainsi nous-avons pu ressentir, concrètement cet été, l’échec cuisant – si j’ose dire – des politiques visant à ralentir le réchauffement global. Et pour tout dire, nous avons parfois eu l’impression de vivre à l’intérieur d’une fournaise.   
Comme disait ma grand-mère : « On ne peut pas être à la fois et au four et au moulin », plagié sans vergogne par Mamère qui affirmait « On ne peut pas être à la fois et au fioul et à l’éolien ». Il a tout piqué à ma mémé ce gars-là, même sa moustache !  Pour filer la métaphore, on peut comprendre qu’il soit difficile d’avoir plusieurs fers au feu en même temps, surtout en période de crise, mais espérons que les grands ratages de l’année passée seront à l’origine des grandes réussites de l’année à venir. Pas comme moi, avec le Dry January, où j’échoue à chaque fois. 

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